Résiliation ordinaire pour aptitude insuffisante à travailler en open space; absence de motifs objectivement suffisants de licenciement; indemnité compensatrice; art. 10 al. 3 let. c, 19 al. 1, 34b al. 1 let. c et al. 2 LPers; 11a al. 1, 31a al. 1 Opers; 336c al. 1 let. b CO; 6 al. 2 LTr
Non-reconduction d’un procureur fédéral; violation du droit d’être entendu; absence de motifs objectivement suffisants de résiliation par défaut d’avertissement préalable des manquements reprochés; non reconduction valable, mais viciée; indemnité punitive. Présentation de l’arrêt du Tribunal administratif fédéral A-4054/2015.
La soumission à une convention collective au sens de l’art. 356b CO: un travailleur membre d’une organisation non signataire à une convention collective et qui ne peut pas y adhérer: peut-il s’opposer au prélèvement d’une contribution de solidarité? Analyse de l’arrêt du Tribunal fédéral 4A_24/2015
Licenciement; nullité; § 18 PG/ZH
La juridiction cantonale a versé dans l’arbitraire en constatant la nullité du congé, alors que les trois conditions cumulatives permettant d’admettre un motif de nullité absolue n’étaient à l’évidence pas réalisées et que le § 18 alinéa 3 PG/ZH excluait expressément la faculté pour l’autorité de recours d’annuler le congé. Le Tribunal administratif aurait dû se contenter de prononcer l'illégalité du licenciement et d’allouer à la personne concernée une indemnité.
Salaires; usure; art. 157 CP, 49 CO, 116 LEI
Constitue le comportement incriminé par l’infraction d’usure (art. 157 CP) le fait, pendant plusieurs années, d’exploiter la force de travail d’une personne, en la contraignant à s’occuper d’enfants mineurs et du ménage, pour une durée hebdomadaire moyenne de 71 heures, sept jours sur sept, sans vacances, en plaçant peu à peu la victime dans une situation d’isolement, sans papiers d’identité et sans ressources financières (50 à 100 fr. par mois d’argent de poche).
Se fondant sur le calcul réalisé par l’OCIRT, la Cour cantonale a retenu que les tâches accomplies par l’intimée en faveur de la recourante représentaient une valeur économique totale de 105’945 fr., alors que la valeur des prestations en nature (logement, nourriture, argent de poche) fournies en échange par la recourante ne s’élevait qu’à 27’456 fr. (cons. 2.3.2).
Certificat de travail
Fonction publique; droit public ou droit privé, statut, nature des rapports de travail; art. 130 et 131 Cst./JU
La Cst. féd. ne règle pas la nature juridique des rapports de travail des employés des collectivités publiques. Les motifs qui plaident en faveur du rapport de droit public résident notamment dans la nature particulière de l’Etat et des tâches exercées par son personnel, les contraintes constitutionnelles qui pèsent sur l’Etat employeur, ainsi que l’absence de besoin d’un recours au droit privé. Aussi bien la doctrine majoritaire privilégie-t-elle le droit public pour régler les rapports de travail du personnel de l’Etat tout en admettant, avec plus ou moins de restrictions, la possibilité de recourir aux contrats de droit privé pour certains salariés. Il n’existe donc pas d’exclusion générale du recours au droit privé pour réglementer les rapports de travail du personnel étatique (rappel de jurisprudence, cons. 3.1).
Pour sa part, le Tribunal fédéral, sans se prononcer sur le point de savoir si les cantons peuvent de manière générale soumettre les rapports de travail qui les lient à des collaborateurs au droit privé, a précisé qu’un tel engagement de droit privé suppose en tous les cas qu’il trouve un fondement dans une réglementation cantonale (ou communale) claire et sans équivoque et qu’il ne soit pas exclu par le droit applicable.
Pour déterminer si un rapport juridique relève du droit privé ou du droit public, on ne peut pas se fonder sur la qualification juridique utilisée par les parties ; ce qui est décisif, c’est le contenu réel du rapport de droit. Si une autorité est partie audit rapport de droit, le droit public est présumé applicable ; en outre, les conditions d’engagement dans le secteur public sont en principe fixées par des décisions soumises à acceptation (rappel de jurisprudence, cons. 3.2).
Aux termes de l’art. 130 Cst./JU, l’Eglise réformée évangélique du Jura (EREJU) est reconnue collectivité de droit public. Conformément à l’art. 131 al. 2 Cst./JU, l’EREJU s’est donné une Constitution. En l’espèce, les parties ont conclu un contrat de travail qui était expressément stipulé conclu « selon les bases légales du Code des obligations ». L’art. 42 al. 3 de l’ordonnance concernant les ecclésiastiques de l’EREJU permet à une paroisse d’engager un collaborateur paroissial dont l’engagement se conclut selon le droit civil. Il s’agit là d’une base légale claire permettant l’engagement de certains collaborateurs selon le droit privé. Il n’y a rien d’insoutenable à compter les concierges/sacristains comme des collaborateurs pouvant être engagés selon le droit privé, à la différence des personnes assumant un ministère pastoral ou diaconal, dont le statut est exhaustivement réglé par l’ordonnance concernant les ecclésiastiques. A l’instar de celle d’un responsable de déchetterie, la tâche d’un concierge/sacristain n’a pas une nature telle qu’elle ne pourrait être confiée qu’à une personne soumise à un statut de droit public (cons. 5.2.1).
Congé immédiat, heures supplémentaires; montant de l’indemnité, imprévision, acceptation par actes concluants; art. 321c al. 3, 337c al. 3 CO
En confirmant l’indemnité fixée par la juridiction de première instance à deux mois de salaire, soit un tiers du montant maximum prévu par l’art. 337c al. 3 CO, le Tribunal cantonal a pris en compte les éléments pertinents du cas d’espèce, à savoir en première ligne le licenciement immédiat de l’intimée par la recourante quelques heures après avoir remarqué l’absence de cette dernière alors que la relation de travail avait duré presque 3 ans et demi ainsi que la faute concomitante de l’intimée n’ayant pas informé son employeur de son état de santé (cons. 5.2).
Il ressort de l’arrêt entrepris que l’intimée a été amenée à travailler un nombre d’heures excédant notablement ce qui était prévisible au moment de la conclusion du contrat. En détaillant l’étendue des tâches confiées à l’intimée, sources d’une charge jugée excessive pour celle-ci, et le caractère imprévisible de cette surcharge, l’autorité précédente a correctement appliqué les conditions de la théorie de l’imprévision. L’employeuse ne peut rien tirer à cet égard de la clause contractuelle selon laquelle les heures supplémentaires sont compensées par le salaire et les vacances, la clausula rebus sic stantibus permettant précisément au juge d’adapter le contrat (cons. 6.2.2.3).
S’il est vrai que les travaux supplémentaires donnant droit à une rémunération spéciale ne sauraient s’étendre sur une longue durée sans que l’employeur donne son approbation, pareil accord peut résulter d’actes concluants. En l’occurrence, l’autorité précédente a estimé que la recourante ne pouvait ignorer le fait que l’intimée accomplissait des heures supplémentaires (cons. 6.2.2.3).
Congé immédiat, salaires, gratification; risque d’entreprise, bonus, interprétation, rémunération convenable, logement, prévoyance; art. 6, 18, 101, 324, 337c, 349a CO, 10 LPP
L’interprétation des clauses contractuelles portant sur la rémunération a été correctement effectuée par la Cour cantonale (cons. 3).
Il résulte de l’art. 324 al. 1 CO que le risque d’entreprise incombe à l’employeur. Lorsque, pour des motifs économiques, il refuse la prestation de travail dûment offerte, l’employeur tombe en demeure et reste devoir le salaire. Cette règle est impérative. Cela étant, il est admis que le travailleur ou le voyageur de commerce soit rémunéré exclusivement à la commission, pour autant que cette rémunération soit convenable (art. 349a al. 2 CO, applicable par analogie au contrat de travail). Le principe selon lequel l’employeur supporte le risque de l’entreprise n’est ainsi pas dépourvu de nuances (cons. 4.4.2).
En l’espèce, le département dirigé par le recourant négociait presque exclusivement en euros, tandis que le salaire du recourant était en francs suisses. Or, l’employé a consenti au système mis en place en signant le contrat ; vu son expérience professionnelle, il ne pouvait ignorer que les revenus de son département seraient très souvent en monnaies étrangères alors que sa rémunération était en francs suisses. Il a néanmoins consenti à ce que celle-ci soit calculée d’après le revenu du département, avec le risque qu’une baisse du cours de change influe sur sa rémunération. Cela étant, les juges d’appel ont retenu à bon escient que le recourant, nonobstant cette baisse du cours, touchait une rémunération convenable au sens de l’art. 349a al. 2 CO. Le recourant ne fait pas l’affront de soutenir le contraire, alors qu’il a conservé, après la réduction admise par l’autorité précédente, un salaire mensuel de quelque 13’600 fr., sans compter 3'775 fr. de « frais de représentation » et un logement gratuit consistant en un appartement de 9 pièces (cons. 4.4.3).
Le montant de son bonus n’a pas été calculé de manière arbitraire par la Cour cantonale (cons. 5).
La résiliation immédiate, même injustifiée, du contrat de travail met fin au rapport de prévoyance professionnelle obligatoire (cf. art. 10 al. 2 let. b LPP). Alors que l’indemnité de l’art. 337c al. 1 CO comprend en principe les cotisations aux assurances sociales, elle ne saurait inclure la cotisation LPP, s’agissant d’une période où le rapport de prévoyance n’existe plus. La doctrine en déduit que le congé immédiat injustifié cause un dommage à l’évolution de l’avoir vieillesse LPP du travailleur, qui disposera d’une prestation de libre passage inférieure à celle qu’il aurait obtenue si les rapports avaient pris fin à l’échéance ordinaire (cons. 6.2.1). Le dommage réside dans une prestation de libre passage moindre, due aux lacunes de cotisations qui n’ont pas été versées jusqu’à l’échéance ordinaire du contrat. Dans un contexte où on ne connaît que le montant du salaire assuré et de la cotisation annuelle totale due aux institutions de prévoyance, il n’est pas possible d’établir quel dommage l’employé a pu subir du fait de la résiliation prématurée du contrat de travail. Cette constatation conduit au rejet du grief, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les questions soulevées par la doctrine (cons. 6.2.2).
Le grief tiré d’une violation de l’art. 337c al. 3 CO, en ce que le montant de l’indemnité pour licenciement immédiat sans justes motifs a été limité par les juges cantonaux à un mois de salaire, est infondé. En effet, le travailleur s’est introduit dans les locaux de l’employeuse en usant du badge d’un collègue alors qu’il était libéré de son obligation de travailler ; il a demandé à se faire transférer une liste de contacts compactée, qui lui permettait d’obtenir en un seul document des données qu’il aurait sinon dû rechercher par lui-même ; ces éléments laissent apparaître un cas limite par rapport au principe même du congé immédiat (cons. 6.3).
Il faut insister sur la nécessité d’une réaction rapide du travailleur en cas d’opposition à un changement d’institution de prévoyance, étant entendu que ce n’est pas tant ce changement en soi qui pose problème que la modification des prestations offertes par la nouvelle institution (cons. 7.4).
Le travailleur – en l’espèce bénéficiaire d’un logement mis à sa disposition par l’employeur – répond du fait de ses proches comme de son propre fait (cf. art. 101 CO). Peu importe, dès lors, qu’une décision de justice antérieure ait ordonné au travailleur de quitter le logement familial, soit en l’occurrence l’appartement mis à disposition par l’employeuse. Le fait que son épouse ait quitté le logement après la fin du rapport de travail lui est donc imputable. Il ne peut arguer qu’il n’avait plus la maîtrise du logement depuis plusieurs années, du fait de la procédure de divorce (cons. 8.3).
Transfert des rapports de travail; fraude à la loi; art. 333 CO
En l’espèce, l’employeur ne parvient pas à critiquer valablement les constatations de la Cour cantonale aux termes desquelles il y a eu transfert d’entreprise. Par conséquent, n’est pas remis en question le raisonnement de la Cour selon lequel le premier licenciement de la travailleuse visait à faire échec au transfert du rapport de travail et que, partant, l’ancienneté de la travailleuse au sein du nouvel employeur devait être prise en compte depuis le début du premier contrat.
Conclusion, procédure, simulation, compétence, faits doublement pertinents, art. 18 et 319 CO, 57 CPC
En l’espèce, la preuve du versement effectif d’un salaire n’ayant pas été rapportée et l’activité exercée n’ayant pas excédé les services habituellement rendus entre concubins, l’autorité cantonale pouvait, sur cette seule base, conclure sans arbitraire que l’accord par lequel un homme âgé indiquait engager son amie en qualité d’assistante personnelle et d’aide pour les problèmes de la vie quotidienne ne reflétait pas la volonté réelle des parties, nonobstant les apparences créées. Le raisonnement de la demanderesse, qui conteste qu’il y ait eu simulation, adopte une prémisse erronée, à savoir que la preuve d’une simulation nécessiterait d’établir le mobile précis des cocontractants ; dans le présent contexte, la cour d’appel pouvait retenir sans arbitraire que la volonté réelle des parties n’était pas de conclure un contrat de travail, sans qu’il soit nécessaire de connaître leur mobile précis, étant entendu que la simulation d’un contrat de travail pouvait conférer des avantages à l’un et/ou l’autre des signataires de l’accord (cons. 4.4.3).
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Rappel de jurisprudence concernant les faits de double pertinence
Définition : Les faits doublement pertinents sont des faits déterminants non seulement pour la compétence du tribunal mais aussi pour le bien-fondé de l’action. Lorsqu’un canton – tel le canton de Genève – institue une juridiction spécialisée pour connaître des litiges découlant d’un contrat de travail, ledit contrat constitue un fait doublement pertinent.
Procédé : Le juge saisi examine sa compétence sur la seule base des allégués, moyens et conclusions de la demande, sans tenir compte des contestations du défendeur et sans procéder à aucune administration de preuves. Les faits allégués (censés établis) doivent être concluants, c’est-à-dire permettre juridiquement d’en déduire le for invoqué par le demandeur. Si la qualification du rapport contractuel pose une question délicate de délimitation, celle-ci devra être élucidée lors de l’examen du bien-fondé de la prétention au fond, en même temps que celle de savoir si un contrat a réellement été passé.
Conséquence : Si, en fonction de l’examen restreint aux éléments précités, le juge arrive à la conclusion qu’il n’est pas compétent, il doit rendre une décision d’irrecevabilité. En revanche, s’il admet sa compétence au regard des allégations du demandeur, le juge procède alors à l’administration des preuves puis à l’examen du bien-fondé de la prétention au fond. S’il conclut finalement que le fait doublement pertinent censé fonder sa compétence n’est pas réalisé, il doit rejeter la demande par une décision sur le fond, revêtue de l’autorité de chose jugée. Ainsi, le tribunal des prud’hommes doit rejeter la demande si, en examinant le fond, il constate l’inexistence d’un contrat de travail.
Exception : Il est fait exception à l’application de la théorie de la double pertinence notamment en cas d’abus de droit de la part du demandeur (cons. 5.2).
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En l’espèce, les instances cantonales se sont appuyées sur les preuves administrées et sur une instruction complète pour en déduire que les parties n’étaient pas liées par un contrat de travail. Or, dans une telle constellation, la jurisprudence prescrit de rendre une décision de fond et de rejeter la demande, par un jugement revêtu de l’autorité de chose jugée (cons. 5.3).
Lorsque la demande contient des prétentions de droit commun et d’autres fondées sur une compétence spéciale, le principe iura novit curia emporte une attraction de compétence vers la juridiction spécialisée. Par conséquent, un tribunal prud’homal institué par le droit cantonal ne peut refuser d’étendre son examen aux moyens de droit fédéral invoqués concurremment avec le droit particulier qui fonde sa compétence spéciale (cons. 5.4).
Dans le cas présent, le nœud du litige était bel et bien le contrat de travail. Par attraction, la juridiction spécialisée, tenue d’appliquer d’office le droit fédéral (art. 57 CPC), est aussi compétente pour examiner si certaines conclusions peuvent s’appuyer sur un autre fondement juridique que le contrat de travail. En conséquence, la Cour de justice ne pouvait pas, sous couvert d’une compétence spécialisée pour les litiges découlant d’un contrat de travail, refuser de connaître des autres questions soulevées en appel, en particulier celle portant sur le point de savoir si un autre fondement pouvait justifier l’indemnité spéciale réclamée par la demanderesse (cons. 5.5).
Congé immédiat, contrat de durée minimale, art. 334 et 337c CO
Un contrat de durée minimale, déploie, pendant la durée minimale convenue, les effets propres au contrat de durée déterminée, en ce sens qu’il ne peut être mis fin aux rapports de travail par un congé ordinaire pour un terme antérieur à celui de l’échéance de la durée minimale fixée conventionnellement. Pour l’employeur, la seule possibilité de mettre unilatéralement un terme au contrat de travail durant cette période est la résiliation immédiate pour justes motifs au sens de l’art. 337 CO (cons. 4.1). Même si l’employeur résilie le contrat pour la fin d’un mois en respectant un délai de préavis, cette circonstance ne fait pas obstacle à la qualification de congé extraordinaire (cons. 4.2). Justifiée ou non, une telle résiliation extraordinaire met fin au contrat en fait et en droit le jour même où elle est communiquée (cons. 4.1).
Qu’elle soit ordinaire ou immédiate, la résiliation consiste en l’exercice d’un droit formateur et, à ce titre, elle revêt en principe un caractère irrévocable. Des exceptions sont possibles : la partie qui a résilié le contrat peut revenir sur sa déclaration si le cocontractant est d’accord avec cette révocation ou s’il a contesté la validité de la résiliation et, ce faisant, manifesté sa volonté de maintenir le contrat (rappel de jurisprudence, cons. 4.1).
En confirmant la fin du contrat pour la fin du mois en cours, malgré la proposition de la travailleuse de maintenir la relation contractuelle, l’employeuse a en l’espèce définitivement mis fin à la relation. Une éventuelle révocation de la résiliation n’entrait alors plus en ligne de compte, puisque le contrat avait déjà pris fin. Les tentatives ultérieures de l’employeuse de faire revenir la travailleuse ne peuvent constituer que des offres de conclure un nouveau contrat de travail. Or, rien dans l’attitude de l’employée ne permet d’admettre qu’elle aurait accepté de conclure un nouveau contrat (cons. 4.2).
En l’espèce, l’employeuse a motivé le licenciement par une perte de confiance mutuelle, sans faire état de manquements particuliers de la part de la recourante ou d’autres circonstances justifiant un congé extraordinaire. Il est manifeste que l’intimée ne disposait pas de justes motifs pour mettre un terme prématuré au contrat de travail (cons. 5.1).
Comme l’indemnité fondée sur un congé-représailles a la même nature juridique que l’indemnité fondée sur l’art. 337c al. 3 CO à laquelle la recourante a finalement droit, force est de conclure que la Chambre des prud’hommes a violé le droit fédéral en rejetant la prétention correspondante de l’employée (cons. 5.2.2).
Protection de la personnalité, homophobie, art. 3, 8 et 14 CEDH, 177, 180, 181 et 261bis CP
La CourEDH a jugé que, lorsqu’une personne soutient de manière défendable qu’elle a subi un harcèlement à caractère raciste, notamment des insultes et des menaces physiques, les États se doivent, en vertu de l’art. 8 CEDH, de prendre toutes les mesures raisonnables pour déterminer s’il existait un mobile raciste et si des sentiments de haine ou des préjugés fondés sur l’origine ethnique avaient pu jouer aussi un rôle dans les événements, cela même lorsque le traitement n’atteint pas le degré de gravité requis par l’art. 3 CEDH. Selon la jurisprudence de la CourEDH, l’orientation sexuelle relève de la protection de l’article 14 : insulter ou ridiculiser une personne en raison de son orientation sexuelle constitue une discrimination aussi grave que celles fondées sur la race, l’origine ou la couleur (cons. 3.1.1).
En droit interne, l’extension de la norme antiraciste de l’art. 261bis CP aux discriminations fondées sur l’orientation sexuelle, adoptée par le Parlement le 14 décembre 2018, traduit la volonté de réprimer de la même manière les actes discriminatoires fondés sur l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse, et ceux fondés sur l’orientation sexuelle (cons. 3.1.2).
Les expressions, gestes ou images dépréciatifs portant sur l’orientation sexuelle peuvent être constitutifs d’injure (art. 177 CP), dans la mesure où ils expriment le mépris. En outre, celui qui aura volontairement fait redouter à sa victime la survenance d’un préjudice réalise l’infraction de menace au sens de l’art. 180 CP. Enfin, le droit suisse réprime la contrainte par « stalking » (art. 181 CP), soit la persécution obsessionnelle d’une personne durant une période prolongée (cons. 3.1.2).
En l’espèce, le Ministère public genevois n’aurait pas dû refuser d’entrer en matière sur la plainte déposée par un employé qui avait indiqué :
Protection de la personnalité, vidéosurveillance, art. 6 et 8 CEDH
La notion de vie privée ne se limite pas à un « cercle intime », où chacun peut mener sa vie personnelle sans intervention extérieure, mais englobe également le droit de mener une « vie privée sociale », à savoir la possibilité pour l’individu de nouer et de développer des relations avec ses semblables et le monde extérieur. À ce titre, elle n’exclut pas les activités professionnelles (§ 88).
En ce qui concerne plus particulièrement la vidéosurveillance sur le lieu de travail, la Cour a jugé que la vidéosurveillance effectuée par l’employeur à l’insu d’une salariée, pendant environ cinquante heures sur une période de deux semaines et l’utilisation de l’enregistrement obtenu dans la procédure devant les juridictions du travail pour justifier son licenciement, constituaient une atteinte au droit de l’intéressée au respect de sa vie privée. La vidéosurveillance non dissimulée de professeurs d’université pendant qu’ils dispensaient leurs cours, dont les enregistrements étaient conservés pendant un mois et consultables par le doyen de la faculté, a également été jugée attentatoire à la vie privée des intéressés (§ 91).
Si l’art. 8 CEDH a essentiellement pour objet de prémunir l’individu contre les ingérences arbitraires des pouvoirs publics, il ne se contente pas de commander à l’État de s’abstenir de pareilles ingérences : à cet engagement négatif peuvent s’ajouter des obligations positives inhérentes au respect effectif de la vie privée ou familiale. Ces obligations peuvent nécessiter l’adoption de mesures visant au respect de la vie privée jusque dans les relations des individus entre eux. La responsabilité de l’État peut ainsi se trouver engagée si les faits litigieux résultaient d’un manquement de sa part à garantir aux personnes concernées la jouissance des droits consacrés par l’art. 8 CEDH (§ 110).
Quelle que soit la latitude dont jouissent les États dans le choix des moyens propres à protéger les droits en cause, les juridictions internes doivent s’assurer que la mise en place par un employeur de mesures de surveillance portant atteinte au droit au respect de la vie privée ou de la correspondance des employés est proportionnée et s’accompagne de garanties adéquates et suffisantes contre les abus (§ 114).
Pour s’assurer de la proportionnalité de mesures de vidéosurveillance sur le lieu de travail, les juridictions nationales devraient tenir compte des facteurs suivants lorsqu’elles procèdent à la mise en balance des différents intérêts en jeu :
i) L’employé a-t-il été informé de la possibilité que l’employeur prenne des mesures de vidéosurveillance ainsi que de la mise en place de telles mesures ? Si, en pratique, cette information peut être concrètement communiquée au personnel de diverses manières, en fonction des spécificités factuelles de chaque cas, l’avertissement doit en principe être clair quant à la nature de la surveillance et préalable à sa mise en place.
ii) Quels ont été l’ampleur de la surveillance opérée par l’employeur et le degré d’intrusion dans la vie privée de l’employé ? À cet égard, il convient de prendre en compte notamment le caractère plus ou moins privé du lieu dans lequel intervient la surveillance, les limites spatiales et temporelles de celle-ci, ainsi que le nombre de personnes ayant accès à ses résultats.
iii) L’employeur a-t-il justifié par des motifs légitimes le recours à la surveillance et l’ampleur de celle-ci ? Sur ce point, plus la surveillance est intrusive, plus les justifications requises doivent être sérieuses.
iv) Était-il possible de mettre en place un système de surveillance reposant sur des moyens et des mesures moins intrusifs ? À cet égard, il convient d’apprécier en fonction des circonstances particulières de chaque espèce si le but légitime poursuivi par l’employeur pouvait être atteint en portant une atteinte moindre à la vie privée du salarié.
v) Quelles ont été les conséquences de la surveillance pour l’employé qui en a fait l’objet ? Il convient notamment de vérifier de quelle manière l’employeur a utilisé les résultats de la mesure de surveillance et s’ils ont servi à atteindre le but déclaré de la mesure.
vi) L’employé s’est-il vu offrir des garanties adéquates, notamment lorsque les mesures de surveillance de l’employeur avaient un caractère intrusif ? Ces garanties peuvent être mises en œuvre, parmi d’autres moyens, par l’information fournie aux employés concernés ou aux représentants du personnel sur la mise en place et sur l’ampleur de la vidéosurveillance, par la déclaration de l’adoption d’une telle mesure à un organisme indépendant ou par la possibilité d’introduire une réclamation (§ 116).
En l’espèce, les requérantes ont fait l’objet d’une vidéosurveillance, mise en place par leur employeur sur leur lieu de travail pendant une durée de dix jours et dirigée vers les caisses du supermarché et leurs alentours. Il n’y a pas eu violation de l’art. 8 CEDH.
Procédure, récusation, amende disciplinaire, art. 50 et 128 CPC
La décision consécutive à une demande de récusation ne s’inscrit pas dans les mesures ordinairement nécessaires à la préparation et à la conduite rapide du procès civil. Il ne s’agit pas d’une ordonnance d’instruction aux termes des art. 319 let. b et 321 al. 2 CPC, mais d’une des « autres décisions » visées par l’art. 319 let. b CPC (cons. 3.2).
Le prononcé infligeant une amende disciplinaire, en particulier celle prévue par l’art. 128 al. 3 CPC pour la répression de procédés téméraires, se présente fréquemment comme un élément accessoire ou additionnel dans une décision portant aussi sur d’autres mesures, voire dans une décision finale. Lorsque ces mesures sont elles aussi contestées, il s’impose d’admettre que la voie et le délai de recours applicables auxdites mesures le sont aussi à l’amende (cons. 4).
Egalité hommes femmes, harcèlement sexuel, art. 328 CO, art. 4 LEg
L’art. 328 al. 1 CO impose à l’employeur de protéger et respecter, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur. Il doit en particulier veiller à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu’ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes. Le harcèlement sexuel peut prendre différentes formes : remarques sexistes, commentaires grossiers ou embarrassants, usage de matériel pornographique, attouchements, invitations gênantes, avances accompagnées de promesses de récompense ou de menaces de représailles. Bien que l’art. 4 LEg ne se réfère qu’à des cas d’abus d’autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées. En définitive, le harcèlement sexuel sur le lieu de travail n’est pas forcément en rapport avec la sexualité (cons. 3.1).
En l’espèce, c’est à bon droit que la Cour cantonale a retenu l’existence d’un harcèlement asexuel : après plusieurs années de collaboration respectueuse, le directeur avait avoué à son employée les sentiments qu’il éprouvait pour elle et lui avait proposé d’entretenir une relation intime, dès mars 2014. Malgré le refus qu’elle lui a d’emblée signifié, il s’est montré insistant et a fait pression sur elle en utilisant sa position de supérieur hiérarchique pour parvenir à ses fins durant toute l’année 2014. Exténuée par cette pression, l’employée s’est retrouvée en incapacité de travail dès la mi-janvier 2015.
Licenciement, motifs, art. 9 Cst.
On ne saurait imputer de faute grave à un fonctionnaire, en ce qu’il aurait épandu du « Roundup » de manière abusive, dans la mesure où le supérieur hiérarchique de l’intimé a validé la manière d’épandre le produit en cause, quand bien même les dosages n’avaient pas été respectés. Le fait que la commune invoque l’attitude du fonctionnaire lorsqu’il a procédé à l’épandage (depuis le véhicule, en tenue de vacancier) pour justifier sa décision met en évidence l’absence de griefs graves et indiscutables de licenciement.
Procédure, qualité pour recourir
Sont irrecevables les recours, tant d’une fonctionnaire que du Conseil d’Etat genevois, à l’encontre d’un arrêt de la Cour de justice annulant un arrêté du Conseil d’Etat en matière de traitement des fonctionnaires.
Il ne se justifie pas de reconnaître à la collectivité publique, en raison de son seul statut d’employeur, la qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire dans le domaine du droit de la fonction publique.
Congé immédiat, gratification, montant de l’indemnité, très hauts revenus, art. 337c CO
Il est erroné de qualifier d’emblée un bonus de gratification, au motif que l’employé dispose d’un « très haut revenu ». Ce dernier critère (ou seuil) ne trouve application que si le bonus est qualifié de gratification facultative ; cette qualification appelle l’application du principe de l’accessoriété et, le cas échéant, une requalification (en salaire) (cons. 4.1.1).
La jurisprudence relative aux bonus n’a qu’un effet indirect sur le calcul de l’indemnité pour licenciement injustifié : le montant de cette indemnité est calculé, en fonction des critères posés à l’art. 337c al. 3 CO, en partant du « salaire du travailleur » qui, lui, dépendra de l’éventuelle requalification (intégrale ou partielle) de la gratification facultative dont aurait bénéficié l’employé (cons. 5.3.1).
Dans le cadre de la fixation de l’indemnité de licenciement, le critère de la situation économique vise les deux parties et le juge ne saurait d’emblée inférer de la situation financière avantageuse de l’employé la nécessité de réduire (en l’occurrence de moitié) l’indemnité qui lui est due en vertu de l’art. 337c al. 3 CO, sans faire la moindre référence à la situation économique de l’employeuse (cons. 5.3.1).
Le « salaire du travailleur » auquel fait référence l’art. 337c al. 3 CO correspond au salaire qu’il a effectivement perçu avant le licenciement et non au « salaire moyen suisse » figurant explicitement à l’art. 5 al. 3 LEg (cons. 5.5.2).
Le salaire (fixe et/ou variable) pris en compte (comme donnée de base) sous l’angle de l’art. 337c al. 3 CO n’est autre que celui que l’employeur a convenu contractuellement avec l’employé (cons. 5.5.3).
Salaires, monnaie étrangère, euro, discrimination, libre-circulation, art. 9 de l’Annexe I ALCP
Le paiement du salaire en euro est possible en Suisse (cons. 2).
Une travailleuse de nationalité allemande, habitant en Allemagne et travaillant en Suisse, entre dans le champ d’application de l’art. 9 Annexe I de l’ALCP (cons. 2.2). En vertu de l’al. 4 de cet article, les travailleurs européens ne doivent pas être discriminés. Les discriminations, tant directes qu’indirectes, sont interdites (cons. 2.3). Cette disposition est directement applicable en droit suisse (cons. 2.4).
Selon la jurisprudence de la CJUE, cette règle contraint également les employeurs privés (cons. 2.5.1). Des discriminations peuvent toutefois être justifiées pour des raisons d’ordre public, de sécurité ou de santé (cons. 2.5.4).
En l’espèce, une modification de la monnaie du salaire du franc suisse à l’euro fut proposée contractuellement sous la menace d’un congé-modification en cas de refus.
Comme l’interdiction de discrimination des ressortissants communautaires relève prioritairement d’une approche relevant de l’économie et non des droits de l’homme, il ne saurait en être fait un usage abusif.
Or, l’ex-travailleuse utilise l’interdiction de non-discrimination de manière contraire à son but en la soulevant plusieurs années plus tard et alors que la discrimination procédait de motifs économiques qui devaient permettre de lui garantir sa place de travail (cons. 3.2).
Salaires, discrimination ; frontalier, art. 9 ALCP ; 2 al. 2 CC
Quand bien même l’art. 9 al. 1 annexe I ALCP déploierait un effet horizontal direct sur les employeurs privés, et quand bien même le paiement d’un travailleur européen frontalier en euros à un taux fictif par rapport au franc suisse constituerait une discrimination prohibée, le travailleur commet un abus de droit manifeste en invoquant cette disposition dans la conjoncture économique très particulière qui a présidé à la modification de son contrat (cons. 6.3).
Procédure, compétence à raison du lieu, art. 34 CPC
Selon l’interprétation jurisprudentielle de l’art. 34 al. 1 CPC, qui correspond à l’art. 19 par. 2 let. a CL 2007, le for peut se trouver dans un lieu où l’employeur n’a aucune sorte d’établissement ni installation fixe (cons. 6).
Le for du lieu habituel de l’activité convenue répond à un but de protection du travailleur à titre de partie socialement la plus faible ; c’est pourquoi celui-ci ne peut pas y renoncer valablement par une convention antérieure à la naissance du différend (art. 35 al. 1 let. d CPC, art. 21 par. 1 CL 2007). Il n’est certes pas garanti au travailleur qu’un lieu d’activité habituel, avec le for correspondant, doive être identifié et reconnu quelles que soient les circonstances particulières de ses propres tâches. On doit néanmoins n’envisager qu’avec retenue la situation singulière où aucun for du lieu habituel de l’activité ne serait disponible.
Concrètement, il ne conviendrait pas de retenir que, parce que l’activité administrative d’un collaborateur du service extérieur est globalement secondaire du point de vue quantitatif, ce travailleur ne puisse pas agir en justice là où il pratique régulièrement cette activité, avec ce résultat qu’il ne puisse agir qu’au siège de l’employeuse alors que son travail n’a aucun lien effectif avec ce lieu-ci. En particulier dans la présente contestation, rien ne justifie que le demandeur soit contraint d’ouvrir action dans le canton de Zurich, ou de renoncer à son action, alors que son activité se pratiquait exclusivement en Valais (cons. 9).
Grève, définition, conditions de licéité, licenciement consécutif à une grève jugée illicite, art. 28 Cst.
La grève est le refus collectif de la prestation de travail due, dans le but d’obtenir des conditions de travail déterminées de la part d’un employeur ; l’exercice du droit à la grève ne touche pas le rapport contractuel en tant que tel, mais consiste en une suspension de la prestation de travail par le travailleur, à laquelle répond une suspension du versement de la rémunération par l’employeur (cons. 4.2).
La licéité de la grève est subordonnée à l’existence de quatre conditions, « inhérentes » à l’exercice du droit de grève ; en tant que telles, elles ne constituent pas une atteinte à la liberté syndicale qui emporterait l’obligation de respecter les exigences de l’art. 36 Cst. (cons. 4.3).
Pour être licite, une grève doit : 1° se rapporter aux relations de travail (porter sur une question susceptible d’être réglée par une CCT) ; 2° être conforme aux obligations de préserver la paix du travail et de recourir à une conciliation ; 3° respecter le principe de proportionnalité (les mesures collectives de combat ne sont licites qu’au titre d’ultima ratio) ; 4° être appuyée par une organisation de travailleurs ayant la capacité de conclure une convention collective de travail (cons. 4.3.1-4.3.4).
En l’espèce, la grève est jugée licite jusqu’au 23 janvier 2013 au plus tard, date à partir de laquelle les grévistes ont fait valoir une revendication politique (au sens large) : la grève a alors poursuivi essentiellement des objectifs ne visant plus la relation de travail, mais la personne du repreneur de l’Hôpital. Il en résulte que la première condition de licéité d’une grève n’était plus remplie (cons. 5.2).
En outre, le maintien de la CCT jusqu’à la fin de l’année 2013 accordait aux employés un instant de répit qui leur permettait de faire valoir leurs revendications par une mesure moins incisive que la poursuite de la grève. Ils ne pouvaient alors plus refuser de reprendre le travail en justifiant leur position par la perte d’un moyen de pression indispensable pour amener à la reprise des négociations sur une (nouvelle) CCT, puisque l’Hôpital avait accepté cette reprise des négociations, contrairement aux grévistes (cons. 5.3).
Lorsque la grève est illicite, cela ne signifie pas encore automatiquement que les travailleurs qui y ont participé puissent être licenciés avec effet immédiat : le juge demeure tenu d’examiner l’ensemble des circonstances qui ont conduit au licenciement.
En l’espèce, l’employeuse pouvait raisonnablement considérer le rapport de confiance comme rompu, car elle avait indiqué sa position juridique lors d’entretiens individuels, avait donné un avertissement clair, avait tenu des entretiens avec les employés assistés de leur avocat avant la notification de leurs licenciements et, à six reprises, avait donné la possibilité aux grévistes d’être réintégrés s’ils acceptaient de suspendre immédiatement la grève (cons. 6).
Congé abusif, égalité hommes femmes, harcèlement sexuel, art. 328, 336 CO, 4 LEg
Les remarques sexistes et les commentaires grossiers ou embarrassants entrent dans la définition du harcèlement sexuel. Bien que l’art. 4 LEg ne se réfère qu’à des cas d’abus d’autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées. Le mécanisme d’allègement du fardeau de la preuve prévu par l’art. 6 LEg ne s’applique pas en matière d’harcèlement sexuel (rappel de jurisprudence, cons. 3.1).
En l’espèce, la comparaison d’une travailleuse avec Mistinguett, faite par un supérieur, à une seule reprise et sans que l’on connaisse la teneur précise de son propos, ne saurait s’apparenter à du harcèlement sexuel (cons. 3.4).
Congé abusif, gratification, prétentions découlant du contrat de travail, qualification du bonus, plan d’intéressement, art. 322d, 336c al. 1 CO
Le congé est abusif, en particulier, lorsqu’il est donné seulement afin d’empêcher la naissance de prétentions juridiques de l’autre partie, résultant du contrat de travail (art. 336 al. 1 let. c CO). Comme l’application de cette disposition suppose que le congé soit exclusivement dicté par la volonté d’échapper à des prétentions juridiques de l’autre partie, l’existence d’un autre motif de congé, réel, suffit à exclure d’emblée une résiliation abusive (rappel de jurisprudence, cons. 3.1.1).
En l’espèce, la Cour cantonale ayant admis qu’il existait plusieurs motifs réels (notamment le non-respect des directives internes de la banque) ayant entraîné une perte de confiance de la banque dans son employé, qui l’ont conduite à le licencier, il est certain que le congé ne lui a pas été signifié dans le seul but de le priver de ses prétentions découlant du contrat de travail, mais qu’il est justement motivé par une perte de confiance (cons. 3.2).
En matière de rémunérations variables, il faut distinguer entre les trois cas suivants : 1° le salaire — variable —, 2° la gratification à laquelle l’employé a droit et 3° la gratification à laquelle il n’a pas droit. Ce n’est que lorsque l’employé n’a pas de droit à la gratification — cas n° 3 — que la question de la requalification du bonus en salaire, en vertu du principe de l’accessoriété lorsque les salaires sont modestes ou moyens et supérieurs, se pose, ce principe étant en revanche inapplicable pour les très hauts revenus (rappel de jurisprudence, cons. 4.2).
Lorsque, par contrat, le bonus-gratification est réservé dans son principe et son montant, et que, lors de chaque versement, l’employeuse formule une réserve, l’employé n’a pas de droit à cette gratification. Par sa simple affirmation « nonobstant les formules d’usage utilisées par l’intimée », le recourant ne démontre pas que seraient réalisées les conditions d’une exception fondant un droit à la gratification (cons. 4.4.1).
Le plan d’intéressement comprend les mesures qu’une entreprise prend afin que ses cadres ou collaborateurs puissent se procurer, à intervalles réguliers et sous des modalités spécifiques, des actions de cette entreprise ou des options sur ses actions. Les modalités comportent généralement un délai pendant lequel chaque lot de titres en voie d’acquisition est seulement promis au bénéficiaire du plan, sans que celui-ci puisse en disposer d’aucune manière (période de blocage). Elles comportent aussi une condition suspensive en ce sens qu’à l’expiration du délai de blocage, le bénéficiaire doit encore être au service de l’entreprise ou du groupe auquel celle-ci appartient pour y avoir droit. Si cette condition s’accomplit, le bénéficiaire reçoit alors les titres concernés, ou leur contre-valeur ; dans le cas contraire, il est déchu de toute prétention. Aussi longtemps qu’il conserve des positions dans le plan d’intéressement, le bénéficiaire a donc intérêt à poursuivre les rapports de travail et à accomplir ses tâches de façon à accroître la valeur de l’entreprise et de ses actions ; il est ainsi attaché à l’entreprise et associé aux objectifs de la direction et des actionnaires (rappel de jurisprudence, cons. 5.1).
En l’espèce, le travailleur ne saurait prétendre que l’événement subordonnant le paiement du bonus (en l’occurrence un départ en bons termes) s’est accompli, dès lors qu’il a été congédié pour perte de confiance (cons. 5.2).
Procédure, transaction, art. 341 CO
L’art. 341 al. 1 CO n’interdit pas aux parties de rompre en tout temps le contrat de travail d’un commun accord, les parties empêchant ainsi la naissance de nouvelles prétentions. Si toutefois leur convention emporte renonciation du travailleur à des prétentions (existantes) de droit impératif, un tel accord n’est valable que sous la forme d’une véritable transaction, comprenant des concessions d’importance comparable de la part de chaque partie (cons. 4.1.1).
Licenciement, certificat de travail, égalité entre hommes et femmes, destiné à la publication; congé-représailles; art. 34c LPers, 10 LEg, 330a CO
En l’espèce, il n’y avait pas congé-représailles d’une greffière du Tribunal administratif fédéral qui avait préalablement initié une procédure en matière d’égalité (cons. 4).
Une absence de la travailleuse pendant la moitié de la durée de l’emploi doit être mentionnée sur le certificat de travail (cons. 5.3.1).
La cause de l’absence, en l’occurrence maladie liée au poste et maternité, peut être mentionnée dans le certificat de travail (cons. 5.3.3).
Salaires, destiné à la publication; indemnité de départ; art. 717 et 725 CO
Un avenant prévoyant une indemnité de départ d’un montant de deux ans de salaire est valable, même s’il a été signé dans un contexte de contrats croisés entre ceux devant en bénéficier, à savoir le directeur général et le directeur financier – par ailleurs actionnaires de la société holding (cons. 5).
Cette indemnité de départ n’est pas illicite, dès lors que la société n’était pas cotée en bourse et que les bénéficiaires étaient également actionnaires uniques (cons. 6).
Sanctions; clause pénale, sanction disciplinaire; art. 321e CO
Lorsque le contrat de travail prévoit une clause pénale en cas de violation de ses obligations par le travailleur, une telle clause ne peut être mise en œuvre que si elle respecte les conditions de l’art. 321e CO. Pour ne pas avoir été liée en l’espèce à l’existence d’une faute du travailleur ou à un dommage effectif de l’entreprise, la clause pénale est nulle.
Une sanction disciplinaire – soit une peine qui vise non pas à réparer le dommage de l’employeur mais uniquement à sanctionner le travailleur – est admissible en droit du travail. Toutefois, une telle sanction doit être suffisamment précise pour qu’on puisse déterminer quelle infraction est sanctionnée par quelle peine. En outre, le montant de la sanction doit être proportionné. Faute d’une telle précision en l’espèce, la sanction disciplinaire n’est pas valable.
Procédure; arbitrabilité; art. 341 CO; 353 CPC
Les prétentions auxquelles le travailleur ne peut pas valablement renoncer selon l’art. 341 al. 1 CO ne sont pas susceptibles d’arbitrage (cons. 2.2.2).
La possibilité offerte par l’art. 353 al. 2 CPC d’exclure l'application du CPC et de convenir que les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont applicables en lieu et place n’est pas admissible en droit du travail (cons. 2.3.3).
Lorsque la clause d’arbitrage couvre l’ensemble des prétentions du travailleur, elle est partiellement nulle (art. 20 al. 2 CO). Dans un tel cas, on doit en principe partir de l’idée que, si les parties avaient connu ce vice, elles n’auraient pas du tout conclu la clause compromissoire, de telle sorte que celle-ci tombe intégralement (cons. 2.3.4).
Après la fin du délai de protection de l’art. 341 CO, toutes les prétentions du travailleur sont arbitrables (cons. 2.3.4).
Gratification; protection de la personnalité; égalité de traitement; art. 322d et 328 CO
Le caractère facultatif de la gratification trouve ses limites dans le respect de l’égalité de traitement. Une décision subjective de l’employeur ne contrevient à l’interdiction de discriminer que dans la mesure où elle exprime une dépréciation de la personnalité du travailleur et lui porte ainsi atteinte. Une telle situation n’est réalisée que si l’employé est placé dans une situation clairement moins avantageuse qu’un grand nombre d’autres employés (rappel de jurisprudence, cons. 3.3). Toutefois, une dépréciation de la personnalité du travailleur ne présuppose pas que le travailleur ait été subjectivement blessé par le non-versement de la gratification. Point n’est besoin de comparer la situation de l’employé discriminé avec celle de tous les employés de la société ; une discrimination par rapport à tous les employés d’un département, même si celui-ci ne compte que cinq personnes, apparaît tout à fait pertinente en l’espèce (cons. 3.6.2).
Comme le contrat de travail n’avait pas encore été résilié au moment où survenait l’occasion donnant lieu au paiement du bonus, la résiliation intervenue postérieurement n’est pas un critère de distinction pertinent par rapport aux autres employés du département (cons. 3.6.2).
Dans la mesure où la gratification est destinée uniquement à récompenser l’employé pour le travail effectué – ce qui peut ressortir des courriers ayant accompagné le versement des précédents bonus – elle ne saurait être réduite ou supprimée pour le motif que le contrat a été résilié (cons. 3.3 et 3.6.2).
L’employeur ne saurait tirer argument du fait que l’employé se soit vu offrir une indemnité de départ discrétionnaire qui, selon lui, compenserait la perte du bonus. En effet, les conditions assorties au versement de cette indemnité montrent qu’il s’agissait de s’assurer un certain comportement du collaborateur licencié (cons. 3.6.2).
Protection de la personnalité; traite d’êtres humains; art. 182 CP
Selon l’art. 182 al. 1 CP, celui qui, en qualité d’offreur, d’intermédiaire ou d’acquéreur, se livre à la traite d’un être humain à des fins d’exploitation sexuelle, d’exploitation de son travail ou en vue du prélèvement d’un organe, est puni d’une peine privative de liberté ou d’une peine pécuniaire; le fait de recruter une personne à ces fins est assimilé à la traite.
Cette disposition protège l’autodétermination des personnes. Il y a traite d’êtres humains lorsque des personnes disposent d’autres êtres humains comme s’il s’agissait d’objets.
Les éléments constitutifs de l’infraction sont les suivants : (1) un auteur qui a la qualité d’offreur, d’intermédiaire ou d’acquéreur, (2) un comportement typique, soit se livrer à la traite d’êtres humains ou recruter des personnes à cette fin, (3) un but notamment d’exploitation du travail de la victime et (4) l’intention.
S’agissant en particulier du comportement typique, on se trouve dans un cas de traite lorsque la victime — traitée comme une marchandise vivante — est contrainte par la force, par la menace, par toute forme de pression, par un enlèvement, une fraude, une tromperie, un abus d’autorité ou en achetant la personne ayant autorité sur la victime ; il suffit que cette dernière soit dans une situation particulière de vulnérabilité, par exemple en étant isolée ou sans ressource dans un pays qui lui est étranger ; il faut ainsi examiner, en fonction des pressions exercées, si elle se trouve ou non en état de se déterminer librement. Le fait de recruter des êtres humains, y compris pour sa propre entreprise, est assimilé à la traite. Il y a exploitation du travail en cas de travail forcé, d’esclavage ou de travail effectué dans des conditions analogues à l’esclavage. Tel est également le cas lorsqu’une personne est continuellement empêchée d’exercer ses droits fondamentaux en violation de la réglementation du travail ou des dispositions relatives à la rémunération, la santé et la sécurité sur le lieu de travail ; concrètement, il peut s’agir notamment de privation de nourriture, de maltraitance psychique, de chantage, d’isolement, de lésions corporelles, de violences sexuelles ou de menaces de mort. Sauf à étendre de manière trop large la notion d’exploitation du travail, de simples violations des dispositions sur le droit du travail ne suffisent en principe pas (cons. 4.3).
Conclusion, destiné à la publication; temps d’essai, computation; art. 77 et 335b CO
Le temps d’essai au sens de l’art. 335b CO commence en principe au jour du début effectif du rapport de travail (et non au jour du début contractuellement prévu si cette date diffère de l’entrée en fonction effective) (cons. 4.4.1).
Lorsque le contrat de travail est conclu le jour de l’entrée en fonction, ce jour n’est pas compté dans la computation des délais selon l’art. 77, al. 1 CO (cons. 4.4.3).
Le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de savoir comment doit être computé le temps d’essai lorsque le contrat de travail est conclu avant le jour de l’entrée en fonction (cons. 4.4.3).
Congé immédiat; remarques sexistes, avertissement; art. 337 CO
Ne constituent pas, en l’espèce, de justes motifs de licenciement immédiat le fait pour un employé d’avoir, lors d’un « pot de départ », tenu devant trois collègues des propos grossiers à connotation sexuelle à l’égard d’une collègue féminine qui n’était pas présente, en posant notamment une question du type « Qui prendrait [cette collègue] à quatre pattes sur la table d’audit ? » et ce, même après qu’il eut fait du pied à trois reprises sous la table à une autre collègue féminine, qu’il eut demandé à un collègue « si [la première collègue féminine] te proposait de te pomper, est-ce que tu serais d’accord ? », et après qu’il eut tenu des propos déplacés à un enfant de trois ans, lui disant « Ta maman est très belle, si j’étais à ta place, je lui ferais des bisous tout le temps », sur quoi la mère lui avait demandé d’arrêter (cons. 4.1).
Le travailleur aurait dû être averti formellement par l’employeuse. Les réactions des collègues n’équivalent pas à un avertissement de l’employeur (cons. 4.3).
Incapacité de travailler; responsabilité de l’employeur; art. 324a, 331 al. 4 CO
Dans le cas où un employeur a été reconnu responsable du dommage subi par un travailleur en raison d’un défaut d’assurance selon les dispositions de la CCT et d’un défaut d’information quant à la possibilité de passer de l’assurance collective d’indemnités journalières à l’assurance individuelle, ne saurait justifier une rupture du lien de causalité le fait que ce travailleur licencié ait repris une activité professionnelle après avoir été licencié.
Convention collective de travail; extension; art. 356 et 356b CO, 18 LECCT
Si certaines entreprises devaient ne pas être soumises à des prestations prévues par une CCT, les entreprises soumises pourraient être désavantagées et leurs travailleurs évincés de leurs places de travail. Cependant, si les commissions professionnelles paritaires et les entreprises concernées pouvaient librement décider de la soumission à la CCT, les concurrents risqueraient de n’être pas traités de manière égale, ce qui contredirait le but de la CCT. En matière d’extension des CCT, le principe d’égalité de traitement doit être observé de manière stricte (cons. 1.3).
Pour déterminer l’activité d’une entreprise en cas d’activité accessoire, c’est l’activité effective qui est déterminante, la doctrine se référant aux volumes d’affaires. Le but de l’extension de la CCT consiste à éviter les distorsions de concurrence (cons. 1.4.3).
Lorsque les volumes d’affaires dans les différents secteurs de l’entreprise changent, il importe de déterminer si ce changement s’explique par une modification de l’activité de l’entreprise, l’activité accessoire devenant l’activité principale, ou s’il ne s’agit que de fluctuations qui ne modifient pas le caractère de l’entreprise (cons. 1.4.4).
Licenciement; aptitude insuffisante à travailler en open space; absence de motifs objectivement suffisants de licenciement; indemnité compensatrice; art. 10 al. 3 let. c, 19 al. 1, 34b al. 1 let. c et al. 2 LPers; 11a al. 1, 31a al. 1 Opers; 336c al. 1 let. b CO; 6 al. 2 LTr
Dans cet arrêt, non destiné à publication aux ATAF, le Tribunal administratif fédéral (le Tribunal) a donné raison à une employée de l’Office fédéral de l’informatique (l’OFIT) qui contestait sa résiliation ordinaire pour inaptitude à travailler en espace ouvert. Elle demandait, certificat médical à l’appui attestant qu’elle faisait partie des 20% des gens trop sensibles au travail en espace ouvert, à pouvoir travailler dans un bureau cloisonné ou à effectuer ses tâches professionnelles à domicile. Cette demande avait été refusée par l’employeur qui avançait que tous les employés évoluaient dans un espace ouvert, y compris le directeur, et que les tâches de l’employée ne pouvaient être effectuées à distance.
Le Tribunal a considéré que l’employeur aurait dû donner la possibilité à son employée d’effectuer la moitié de son travail à domicile. Il a accordé à l’employée une indemnité de six mois de salaire, la résiliation s’avérant illicite par défaut de l’employeur d’avoir pris toutes les mesures raisonnables au vu de la situation de son employée.
Salaires, incapacité de travailler; travail irrégulier; art. 324a CO, 7 OLAA
La question du droit au salaire est déterminante pour fixer la nature des indemnités journalières versées par l’assurance-maladie. Elle l’est par conséquent également lorsqu’il s’agit de fixer le moment de la fin du droit à la couverture d’assurance-accidents (cons. 4.1).
L’art. 324a al. 4 CO permet de substituer, notamment par un accord écrit, une couverture d’assurance à l’obligation légale de payer le salaire, à condition toutefois que les travailleurs bénéficient de prestations au moins équivalentes. Dans le domaine de l’assurance couvrant le risque de perte de gain en cas de maladie, les parties peuvent librement choisir, soit de conclure une assurance sociale d’indemnités journalières régie par les art. 67 à 77 LAMal, soit de conclure une assurance d’indemnités journalières soumise à la LCA (cons. 4.2).
L’art. 324a al. 1 et 2 CO étant une norme relativement impérative, des dérogations peuvent être prévues par les parties. Par exemple, il est permis d’assurer la couverture des empêchements de travailler survenant durant les trois premiers mois de travail, lorsque les rapports ont été conclus pour moins de trois mois. Dans le cas d’un régime plus favorable, les indemnités journalières doivent être considérées comme des prestations versées en lieu et place du salaire, conformément à l’art. 7 al. 1 let. b OLAA, aussi longtemps qu’elles sont dues selon le contrat d’assurance, mais au plus tard jusqu’à la cessation des rapports de travail. Autrement dit, les indemnités journalières d’assurance-maladie ne représentent plus une prestation accordée en remplacement du salaire après la fin des rapports de travail (rappel de jurisprudence). Lorsqu’il existe un régime plus favorable, ce n’est donc pas, contrairement à l’opinion des premiers juges, le régime minimum de l’art. 324a CO qui est déterminant pour le maintien de la couverture d’assurance LAA (cons. 4.3).
Dans le régime de l’assurance privée LCA, le contrat peut prévoir le versement des indemnités en mains de l’employeur ; celui-ci accomplit une tâche administrative définie par le contrat d’assurance, en ce sens qu’il lui appartient d’encaisser les indemnités journalières lesquelles sont cependant dues à l’assuré, et non pas à lui. Or le versement à l’employeur dans ces différents cas de figure présuppose, par définition, le maintien d’un rapport de travail. Si tel n’est pas le cas, l’indemnité est versée directement à l’assuré, qui en est le créancier (cons. 4.5).
Égalité entre hommes et femmes; discrimination indirecte; art. 8 Cst., 3 LEg
Peut rester ouverte la question de savoir si constitue une discrimination indirecte liée à la qualité de femme enceinte la prise en compte des absences liées à la maternité dans la période de six mois nécessaire à l’évaluation des salariés pour décider d’une éventuelle augmentation de salaire. En effet, la cause doit être renvoyée à la juridiction précédente puisque, pour une des années litigieuses, l’employeur a tout de même été en mesure d’effectuer une évaluation, alors que la salariée avait été absente pendant plus de six mois (cons. 7.2).
En revanche, pour l’autre année litigieuse, durant laquelle la salariée a été absente pendant plus de 300 jours, et à supposer même que la prise en compte de cette période d’absence soit constitutive d’une discrimination indirecte liée à la qualité de femme enceinte de la salariée, les juges précédents ont eu raison de juger qu’elle répondait en l’occurrence à un motif objectivement fondé. En effet, une période de référence de deux mois à peine apparaît insuffisante pour permettre une évaluation suffisamment fiable et servir de fondement à une augmentation salariale. Le refus des intimés d’augmenter le salaire de la recourante pour 2011 n’apparaît dès lors pas critiquable (cons. 7.3).
Liberté syndicale; droit d’accès; art. 28 Cst, 11 CEDH
Le syndicat dispose de la qualité pour agir devant le TF au sens de l’art. 89 LTF (cons. 1).
L’art. 28 al. 1 Cst. garantit la liberté syndicale, qui constitue un cas spécial de liberté d’association au sens de l’art. 23 Cst. La liberté syndicale est essentiellement un droit de défense à l’égard de l’Etat mais elle déploie également un certain effet horizontal indirect dans les relations de travail. La composante individuelle de la liberté syndicale confère le droit de participer à la création d’un syndicat, de s’y affilier, de participer à son activité et d’en sortir. La composante collective de la liberté syndicale comprend le droit des syndicats d’exercer librement leur activité (cons. 4.1).
L’art. 28 Cst. ne prévoit pas expressément un droit d’accès au lieu de travail en faveur des représentants syndicaux (cons. 5).
La présente espèce concernant des bâtiments de la collectivité publique, la question du droit d’accès des syndicats à des locaux privés peut demeurer indécise (cons. 5.3).
L’Etat doit rendre possibles les activités des syndicats ; il ne doit pas empêcher les représentants syndicaux d’accéder aux locaux administratifs (cons. 5.3.1).
En principe, dans le secteur public, le droit des représentants syndicaux d’accéder aux locaux de l’Etat employeur pour entrer en contact avec leurs propres affiliés et veiller au maintien de leurs relations avec eux constitue une composante fondamentale de la liberté syndicale collective au sens de l’art. 28 Cst. (cons. 5.4).
Ce droit n’est certes pas absolu, mais les restrictions apportées en l’espèce par le gouvernement cantonal ne respectent pas le principe de proportionnalité (cons. 6).
Protection de la personnalité; surveillance des communications électroniques, vie privée; art. 8 CEDH
La Cour européenne des droits de l’Homme a jugé qu’en l’espèce, la surveillance des communications électroniques du travailleur a emporté violation du droit au respect de la vie privée et de la correspondance, dès lors que le travailleur n’avait été informé ni de la nature ni de l’étendue de cette surveillance, ni du degré d’intrusion dans sa vie privée et sa correspondance, et que n’ont pas été déterminées les raisons spécifiques qui auraient justifié la mise en place des mesures de surveillance, ni si l’employeur aurait pu faire usage de mesures moins intrusives pour la vie privée et la correspondance du travailleur, ni encore si l’accès au contenu des communications avait été possible à son insu.
Congé en temps inopportun; Cumul de périodes de protection; art. 336c CO
Dans une affaire où se posait la question de savoir si deux périodes d’incapacité étaient liées entre elles ou indépendantes au sens de l’art. 336c CO, les juges cantonaux ont versé dans l’arbitraire en omettant de prendre en compte les propos du médecin généraliste dont la crédibilité n’était objectivement pas discutable ni discutée (cons. 3).
Dès lors que rien, dans les éléments recueillis, et en particulier dans les explications du médecin traitant, n’indique que le facteur de stress constitué par les atteintes à la santé physique (et leurs conséquences sociales) soit suffisamment marginal pour qu’on doive considérer la maladie psychique comme indépendante (ce qu’il incombait, le cas échéant, au travailleur de tenter de démontrer alors qu’il a renoncé à l’expertise qu’il avait dans un premier temps sollicitée), les pathologies physiques et psychiques sont liées à un point suffisant pour exclure de retenir en droit un nouveau cas d’incapacité de travail ouvrant une nouvelle période de protection (cons. 4).
Salaires; salaire minimum légal; art. 8, 27, 28, 36, 49 et 94 Cst.; LEmpl/NE
La compétence des cantons d’instaurer un salaire minimum général n’est pas contraire au droit fédéral, ni aux autres garanties constitutionnelles.
Les objectifs poursuivis par la révision de la LEmpl/NE relèvent de la politique sociale, que les cantons demeurent libres d’adopter, et non d’une mesure de politique économique, qu’en principe seule la Confédération serait en droit d’adopter, aux conditions de l’art. 94 Cst. (cons. 5.1 à 5.5).
En outre, l’instauration d’un salaire minimum ne constitue pas une atteinte disproportionnée à la liberté économique des employeurs (art. 5.6).
La liberté syndicale n’est pas non plus violée (cons. 6), ni la primauté du droit fédéral – dès lors que les objectifs poursuivis par la LEmpl/NE dépassent de loin le but de protection des travailleurs que tend déjà à réaliser le droit public fédéral (cons. 7) –, ni encore le principe d’égalité dans la loi (cons. 9).
L’acte attaqué ne pourra déployer ses effets que de manière ex nunc, à savoir à partir du prononcé du présent arrêt (cons. 10).
Égalité entre hommes et femmes; destiné à la publication; discrimination salariale; profession typiquement féminine; art. 8 Cst., 3 LEg
Le fait qu’une profession soit qualifiée de typiquement féminine ne signifie pas automatiquement qu’il existe une discrimination salariale à l’encontre des personnes qui l’exercent. En l’espèce, les personnes exerçant la profession d’enseignant à l’école primaire dans le canton d’Argovie ne subissent pas de discrimination salariale.
Détachement de travailleurs; dépassement des horaires hebdomadaires; travail le dimanche sans autorisation; sanction; art. 1, 2 et 9 LDét, 2 ODét, 9 et 19 LTr, 360a CO, 27 Cst., 18 LDIP, ALCP
Rappel des règles et principes régissant le détachement de travailleurs en Suisse depuis l’Union européenne (cons. 2).
Le fait de ne pas respecter les limites concernant la durée du travail hebdomadaire et l’interdiction du travail le dimanche constitue une infraction à la LDét qui ne saurait être qualifiée de légère (cons. 3).
La sanction consistant en une interdiction de proposer ses services en Suisse pendant un an est adéquate et proportionnée (cons. 4.2.2), et ne représente pas une discrimination prohibée (cons. 4.2.3).
Il ne reste dès lors plus de place pour invoquer la liberté économique de l’art. 27 Cst. (cons. 5).
Congé immédiat; procédure; destiné à la publication; art. 337 CO; art. 75 LTF
Le principe de la double instance signifie que les moyens soumis au Tribunal fédéral doivent, si possible, avoir déjà été soulevés devant l’instance cantonale précédente (cons. 1.1).
Quant au principe selon lequel la décision de renvoi d’une instance supérieure lie aussi bien l’instance inférieure que l’instance supérieure elle-même si elle connaît à nouveau de la même affaire par la suite, il implique qu’une partie qui ne soulève que des moyens directement à l’encontre de la décision de renvoi de la seconde instance cantonale puisse porter son recours devant le Tribunal fédéral sans devoir à nouveau saisir cette seconde instance cantonale après avoir reçu la décision rendue sur renvoi par la juridiction de premier degré (cons. 1.5).
Dès lors qu’il avait été contractuellement garanti à des travailleurs qu’ils conserveraient leurs fonctions d’administrateurs et de directeurs, en sus de leurs fonctions de collaborateurs, le fait pour l’employeuse de les en priver justifiait une démission avec effet immédiat, en réponse à cette violation contractuelle (cons. 3).
En matière de résiliation avec effet immédiat, ladite résiliation doit être prononcée dès la connaissance du motif de résiliation ; à défaut, on doit considérer que l’accomplissement du délai de congé était subjectivement supportable pour celui qui résilie. La durée admissible entre la connaissance du motif et l’annonce de la résiliation se détermine au cas par cas (cons. 4.1).
En l’espèce, les travailleurs étaient autorisés à démissionner avec effet immédiat au moment où la modification de leur statut, contraire à des garanties contractuelles sur le maintien de ce statut, allait être décidée par l’employeur (cons. 4.4 et 4.5).
Fin des rapports de travail; solde de vacances; art. 329 CO
Un travailleur malade, qui prétend bénéficier d’un solde de 32,67 jours de vacances – solde qu’il n’aurait pas pu compenser entièrement durant les deux mois de son délai de congé, compte tenu du temps nécessaire pour ses visites médicales et pour la recherche d’un nouvel emploi selon l’art. 329 al. 3 CO –, voit cette prétention lui être refusée par les juges à juste titre, dès lors qu’il n’a pas allégué avoir subi des examens médicaux durant cette période et qu’il a admis ne pas avoir voulu chercher un autre emploi (cons. 6.3).
Gratification; bonus; période à prendre en compte pour déterminer l’existence d’un «très haut revenu»; art. 18, 322, 322a, 322d CO
Pour déterminer si l’employé perçoit un « très haut revenu », il faut tenir compte des revenus effectivement perçus durant l’année ; exceptionnellement, on peut prendre en considération la rémunération effectivement perçue durant la période litigieuse, en particulier lorsque, comme en l’espèce, le travailleur a exercé son activité professionnelle seulement pendant quelques mois pendant la seconde année litigieuse (en l’occurrence cinq mois) (c. 3).
Procédure; qualité pour recourir contre une décision portant sur un blâme; art. 45 ss LSt/NE; 82 let. a, 83 let. g, 85, 113, 115, 116 LTF
La décision attaquée qui porte sur un blâme n’a pas d’incidence sur le traitement de l’employé de sorte que seule la voie du recours constitutionnel subsidiaire est ouverte (c. 3) ; un canton n’a pas la qualité pour recourir contre une décision portant sur un blâme dans la mesure où il n’est pas atteint d’une manière analogue à celle d’un employeur privé ; le blâme est en effet une mesure typique du droit disciplinaire de la fonction publique et le canton intervient donc comme détenteur de la puissance publique (c. 4).
Congé abusif; protection de la personnalité; conditions pour licencier un employé à la suite d’une dénonciation à son encontre; art. 328 al. 1, 336 al. 1 CO
Un congé ordinaire n’est pas abusif du seul fait qu’en définitive, l’accusation élevée contre l’employé se révèle infondée ou ne peut pas être confirmée ; il faut en plus que l’employeur ait accusé le travailleur avec légèreté, sans justification raisonnable ; l’employeur doit vérifier les faits dénoncés et permettre au travailleur de se défendre équitablement lorsque son honneur est compromis ; les démarches à accomplir par l’employeur se déterminent en fonction des circonstances d’espèce ; en l’occurrence, le congé est abusif, l’employeur n’ayant pas procédé à toutes les vérifications qui s’imposaient ni permis à l’employée de se défendre efficacement (c. 2-4).
Fin des rapports de travail; non-reconduction d’un procureur fédéral; violation du droit d’être entendu; absence de motifs objectivement suffisants; indemnité; art. 29 al. 2 Cst.; 10 al. 1 let. d, 29 et 30 al. 1 PA; 10 al. 3 let. b et c, 14 al. 2 let. b et c, 34b al. 1 let. a, 34b al. 2, 34c al. 1 let. b LPers; 336 CO
Salaire; gratification; qualification d’un bonus comme gratification ou élément de salaire; art. 322d CO
Pour déterminer si la rémunération du travailleur doit être qualifiée de « très haut revenu », c’est-à-dire si elle équivaut ou dépasse le seuil de cinq fois le salaire médian suisse, il faut tenir compte de tous les éléments de rémunération – peu importe leur désignation, leur régularité ou leur fondement juridique –, sur l’année qui précède, pour peu que celle-ci soit pertinente (c. 2).
LEg; salaires; pouvoir d’examen du TF en matière d’égalité salariale; prescription de la prétention fondée sur une discrimination salariale; preuve de la discrimination salariale; art. 8 al. 3 Cst.; 3 al. 2, 6, 13 al. 1 LEg; 110 LTF; § 45 VPO/BL; 128, 130 al. 1 CO
Les litiges fondés sur une discrimination salariale en matière de droit public du travail sont régis par le droit cantonal de procédure ; savoir si le traitement salarial viole ou non la garantie constitutionnelle de l’égalité salariale est une question que les autorités cantonales mais aussi le Tribunal fédéral examinent librement et non seulement sous l’angle de l’arbitraire (c. 4).
Une prétention fondée sur une discrimination salariale au sens des art. 8 Cst. et 3 LEg se prescrit par cinq ans conformément à l’art. 128 CO, qu’il s’agisse de rapports de travail de droit privé ou public (c. 5).
L’employé qui invoque une discrimination salariale doit rendre celle-ci vraisemblable ; il appartient alors à l’employeur de démontrer que la différence de salaire se fonde sur des motifs objectifs (c. 6-8).
Procédure; droit applicable (privé ou public) au personnel engagé par une personne morale de droit privé exerçant une tâche publique; art. 5 Cst./NE; 9 Cst.
Si une tâche étatique est transférée à une personne morale de droit privé, celle-ci reste régie par le droit privé, même si elle exerce des tâches publiques ; son personnel est régi par le droit privé. Tel est également le cas lorsqu’une tâche étatique est transférée à une entité de droit privé créée dans ce but (c. 5).
Congé abusif pour cause d’activité syndicale de l’employé; fixation du montant de l’indemnité due; art. 335 al. 1, 336 al. 2 let. a, 336a al. 1 et 2 CO
L’activité syndicale visée à l’art. 336 al. 2 let. a CO n’est protégée que si elle est exercée de façon conforme au droit ; elle se réfère notamment à la possibilité d’informer les travailleurs du rôle et de l’organisation des syndicats, à la nécessité de défendre les droits des travailleurs et au renforcement de l’organisation syndicale sur le lieu de travail ; le congé n’est abusif que s’il existe un lien de causalité entre l’activité syndicale et le licenciement (c. 3).
Le montant de l’indemnité pour congé abusif est fixé par le juge en fonction de l’ensemble des circonstances d’espèce, notamment de la gravité de l’atteinte à la personnalité du travailleur, de la manière dont le licenciement a été signifié et des effets économiques de la résiliation pour l’employé ; le salaire déterminant est le salaire brut du dernier mois ou la moyenne des salaires bruts de la dernière année ; les autres prestations de l’employeur qui revêtent un caractère salarial comme le 13e salaire doivent être prises en compte (c. 4).
Procédure; validité de l’autorisation de procéder en cas d’incompétence rationae valoris; art. 4 al. 1, 59, 60, 197, 209, 227 al. 2 et 3 CPC; 1 let. a et 2 al. 1 d LJT/VD; 41 al. 1 et 2 CDPJ/VD; 113 al. 1bis OJV
En droit vaudois, le juge matériellement compétent au fond est l’autorité de conciliation ; si, entre la requête de conciliation et la demande au fond, les conclusions sont modifiées de telle sorte que le tribunal qui avait remis l’autorisation de procéder soit compétent materiae valoris pour statuer au fond, la validité de l’autorisation de procéder n’est pas entachée (c. 3-4).
Procédure; transmission de données d’un employé de banque à la justice américaine; procédure ordinaire ou simplifiée; compétence du tribunal des Prud’hommes du canton de Zurich; art. 91 al. 2; 243 CPC
Les actions tendant pour un travailleur à s’opposer à la transmission de ses données à des autorités étrangères sont des litiges qui sont en principe de nature non patrimoniale (c. 6.5). La procédure ordinaire est donc applicable à l’exception de la procédure simplifiée, de sorte que le tribunal des Prud’hommes du canton de Zurich n’est pas compétent à raison de la matière pour en connaitre. La question de savoir si un litige est de nature patrimoniale s’examine d’office et le juge n’est pas lié par un accord des parties sur ce point (c. 5).
Procédure; fin des rapports de travail; délai pour prendre position lorsqu’il est envisagé de mettre fin aux rapports de travail; état de dissensions avec l’employeur par voie de presse; motif justifié de résiliation des rapports de travail; art. 10 al. 3 LPers; 337 CO
Un délai de 8 à 10 jours (voire 12 jours comme dans le cas présent) est admissible, sous l’angle du droit d’être entendu, pour préparer des objections sur la communication de l’employeur de sa volonté de mettre fin aux rapports de travail (c. 2.2). Un avertissement n’est pas nécessaire lorsqu’il résulte de l’attitude du travailleur qu’une telle démarche serait inutile (c. 3.2). Motif justifié de licenciement lorsqu’un travailleur choisit à deux reprises d’exposer ses problèmes, réels ou non, dans un journal satirique, avec l’objectif de tourner ses supérieurs en dérision et de susciter la polémique au sein de son service (c. 3.4).
Congé immédiat; gratification; licenciement immédiat pour justes motifs suite à l’arrestation d’un employé de banque pour blanchiment d’argent aggravé; délai pour agir depuis la connaissance du juste motif de licenciement; versement d’un bonus en présence d’un très haut revenu; art. 322, 322d, 337 CO
La participation d’un employé de banque avec le rang de cadre à une vaste affaire de blanchiment d’argent, si elle est avérée, est de nature à justifier un congé immédiat pour justes motifs (c. 3.5). L’employeur n’a pas tardé à agir en attendant de voir comment évoluait la procédure pénale, la prolongation de la détention préventive constituant un indice défavorable pour l’employé (c. 3.5). Confirmation de la jurisprudence selon laquelle un bonus n’est jamais requalifié en salaire en présence de très hauts revenus, ce par quoi il faut entendre un revenu égal ou supérieur au salaire annuel médian multiplié par cinq (c. 4.2).
Fin des rapports de travail; validité d’une convention mettant fin aux rapports de travail; art. 10 al. 1, 13 al. 1 et 3, 34 al. 1 LPers; 30 al. 1 et 2 OPers; 23ss, 341 al. 1 CO
Un accord de résiliation du contrat de travail est admissible dans les rapports de travail relevant du droit du personnel de la Confédération ; selon la conception du législateur, la résiliation conventionnelle devrait même être le mode normal d'extinction des rapports de travail conclu pour une durée indéterminée (c. 3.2). La convention de résiliation est un contrat de droit administratif, qui s’interprète selon les mêmes règles que les contrats de droit privé (c. 4). Contestation de la validité d’une telle convention par un agent, au titre de vice du consentement (c. 5).
Salaire; égalité entre hommes et femmes; art. 8 al. 3 Cst.; 3 al. 2 LEg
La profession d’enseignant de l’école primaire qui était qualifiée de neutre sous l’angle du genre doit aujourd’hui être considérée comme une fonction typiquement féminine pouvant ouvrir la voie à une discrimination fondée sur le genre (c. 9.2). Rappel des critères permettant d’admettre une discrimination en raison du sexe, directe ou indirecte (c. 6). L’arrêt attaqué, qui avait considéré que la profession d’enseignant de l’école primaire était neutre sous l’angle du genre est ainsi annulé et la cause est renvoyée à l’instance précédente afin qu’elle détermine si la grille de salaire appliquée dans le canton d’Argovie est susceptible d’engendrer une discrimination (c. 9.2).
Devoir de diligence et de fidélité; violation du devoir de fidélité; avertissement et déclassement; art. 10 al. 3, 25 al. 2 let. b et c LPers; art. 25 al. 3 let. a et b, 104a al. 1 OPers
Violation du devoir de fidélité d’un cadre de la Police fédérale qui n’a pas veillé à ce que son subordonné ait un comportement irréprochable ; exigence accrue d’exemplarité à l’égard des cadres ; avertissement préalable à une résiliation en cas de nouvelles violations des devoirs de fonction ; mesure de déclassement.
Salaire; voyageur de commerce; provision du travailleur ou du voyageur de commerce; art. 322b al. 3, 350a al. 1 CO
Sans trancher la question controversée en doctrine de la portée de l'art. 350a al. 1 CO par rapport à l'art. 322b al. 3 CO, qui est notamment de savoir si l'art. 322b al. 3 CO conserve sa portée après la fin du contrat, le Tribunal fédéral expose qu’il n’existe aucun motif pour traiter le voyageur de commerce plus favorablement que les autres travailleurs également rémunérés à la provision, de sorte que les parties à un contrat de travail de voyeur de commerce devraient pouvoir reporter l'exigibilité des provisions conformément à l'art. 339 al. 2 CO (c. 2.2). En l’espèce, il n’y a pas d’arbitraire, lorsqu’une question est controversée, à choisir une solution défendue par une partie de la doctrine plutôt qu’une autre (c. 2.3)
Fin des rapports de travail; prescription des créances découlant du contrat de travail; interprétation d’une convention de rupture; art. 127, 112, 176, 319 CO
Les créances de salaire et d’indemnité de fin de rapports contractuels sont des créances indépendantes, qui reposent sur des critères qui leur sont propres, bien qu’elles aient leur fondement dans le même contrat. Le libellé d’un commandement de payer visant explicitement des indemnités de départ n’interrompt donc pas la prescription à l’encontre des prétentions de salaire (c.3.2.1).
Une convention de rupture conclue entre un employé et la société mère d’un groupe de sociétés peut selon les circonstances emporter une forme de stipulation pour autrui (ou une reprise de dette externe) déployant ses effets à l’encontre d’une filiale (c.4.3). Une filiale peut donc se prévaloir d’une convention pour solde de tout compte signée entre l’employé et la société-mère.
Fonction publique; congé abusif; résiliation abusive dans le cadre d’une réorganisation; art. 10 al. 3 let. e, 34c al. 1, let. b LPers; 336 CO
La résiliation d’un contrat de travail d’un agent de plus 50 ans, au bénéfice d’un très long rapport de service et dans un domaine spécialisé, est abusive lorsqu’elle est prononcée dans le cadre d’une réorganisation qui constituait un moyen pour le licencier et non un but en soi, sa place ayant été redéfinie et non réellement supprimée.
Convention collective de travail; prélèvement d’une contribution de solidarité sur le salaire en cas d’affiliation à un syndicat non signataire de la CCT; art. 356 al. 1, 356b al. 1, 2 et 3, 356c al. 1, 357 al. 1 CO; 77 CCT SGr; 74 al. 2 let. a LTF
Est une question juridique de principe la question de savoir si un travailleur membre d’un syndicat non signataire de la CCT et qui ne peut pas y adhérer peut s’opposer au prélèvement d’une contribution de solidarité sur son salaire en application de l’art. 356b al. 3 CO (c. 1).
Lorsque le travailleur n’est pas membre d’une organisation signataire de la CCT, son assujetissement à celle-ci peut prendre diverses formes, rappelées ici par le Tribunal fédéral (c. 2).
Une disposition conventionnelle qui prévoit le prélèvement d’une contribution de solidarité est aussi valable lorsque la soumission à la CCT est indirecte (c. 3).
En cas de contrainte de soumission, le travailleur peut s’opposer au prélèvement d’une contribution de solidarité lorsque le syndicat auquel il appartient réunit les conditions pour être reconnu en tant que partenaire social mais s’est vu refuser par les parties à la CCT son adhésion à celle-ci (c. 4).
Salaire; gratification; notion de «très haut revenu» excluant de qualifier de salaire le bonus perçu par l’employé; art. 1, 322, 322a, 322d CO
Lorsque l'employé perçoit un très haut revenu, le bonus reste toujours une gratification et ne doit pas être qualifié de salaire (c. 4) ; par « très haut revenu », on entend une rémunération totale de l'employé qui atteint ou dépasse cinq fois le salaire médian suisse du secteur privé ; pour déterminer si ce seuil est atteint, il faut tenir compte de la totalité de la rémunération du travailleur au cours de l'année donnée, soit le salaire de base et le bonus versé et calculé selon les données de l'exercice précédent (c. 5) ; pour 2009 – déterminant en l'espèce –, le salaire médian peut être estimé à CHF 5'900.-, le seuil du très haut revenu s'élevant ainsi à CHF 354'000.- (5'900 x 12 x 5) (c. 6).
Droit public; non-versement des cotisations salariales; prescription de la prétention en réparation du dommage causé à la caisse de compensation; art. 14, 16, 52 LAVS; art. 34 ss RAVS; art. 60, 135, 136, 137 CO; art. 303 LP
La prescription du droit à la réparation du dommage causé par l'employeur à la caisse de compensation en raison du non-versement des cotisations salariales ne peut être interrompue que par des actes juridiques qui concernent cette prétention en tant que telle ; il ne peut pas s'agir d'actes portant sur la prétention en paiement desdites cotisations ; en l'espèce, l'autorité cantonale a valablement constaté la prescription du droit à la réparation du dommage de la caisse, faute d'acte interruptif de prescription (c. 2-4).
Procédure; compétence locale en cas de contestation de l’existence d’un contrat de travail; application de la théorie des faits de double pertinence; art. 34 al. 1, 59 al. 2 let. b CPC; 1 al. 1 let. a LTPH/GE
Dans l'examen de la compétence du tribunal, les faits dits simples, c'est-à-dire qui ne sont déterminants que pour la compétence, doivent être prouvés à ce stade déjà s'ils sont contestés par le défendeur ; en revanche, les faits doublement pertinents, soit ceux qui sont aussi déterminants pour le bien-fondé de l'action, sont censés être établis sur la base des allégués, moyens et conclusions de la demande – sous réserve d'abus de droit du demandeur – et ne doivent être prouvés qu'au stade de la décision au fond ; il suffit donc que le demandeur allègue l'existence d'un contrat de travail de façon suffisante ; s'il se révèle, au cours des débats principaux, qu'il n'y a pas de contrat de travail entre les parties, le tribunal rejettera la demande, sa compétence étant maintenue (c. 4).p
Vacances; conditions formelles à l’indemnisation des vacances incluse dans le salaire; question de l’abus de droit; art. 329d al. 1 CO; 2 al. 2 CC
Pour que l'indemnité de vacances puisse être incluse dans le salaire total, il faut que le contrat de travail ainsi que les décomptes de salaires périodiques mentionnent clairement quelle est la part du salaire global destinée à l'indemnisation des vacances ; il est donc essentiel que la part afférente aux vacances soit indiquée sur chaque fiche de salaire pour que le travailleur connaisse exactement le montant y relatif (c. 3.2-2.5).
L'employé n'abuse pas de son droit d'invoquer une norme impérative comme l'art. 329d CO, sauf circonstances tout à fait particulières ; tel pourrait être le cas si la situation juridique était claire pour l'employé, qui dispose comme en l'espèce d'une formation d'avocat ; toutefois, le travailleur a en l'occurrence attiré l'attention de son employeur sur l'irrégularité formelle des fiches de salaire qui n'indiquaient pas la part aux vacances ; celles-ci n'ont été corrigées que trois ans plus tard ; l'employé n'abuse donc pas de son droit puisque de par son avertissement, l'employeur aurait pu régulariser la situation et éviter le risque de devoir payer les vacances à double (c. 3.6).
LTr; droit public; qualité de fonction dirigeante élevée au sein d’une petite structure; art. 3 let. d LTr; 9 OLT 1
La qualité de « fonction dirigeante élevée » suppose une structure d'entreprise un tant soit peu complexe et hiérarchisée, l'employé visé devant se trouver au sommet de la hiérarchie et bénéficier d'une position privilégiée parmi le personnel ; en l'espèce, l'employé qui, à l'aide d'un subordonné engagé à temps partiel, se relaie avec l'administrateur de la société pour assurer l'exploitation d'un tabac ouvert 24/24h n'exerce pas de fonction dirigeante élevée même si, formellement, les tâches exercées et la rémunération sont identiques à celles de l'administrateur (c. 3).
Conclusion; admissibilité de soumettre les rapports de travail d’un employé communal au droit privé; art. 83 let. g LTF; 70 LCo FR; 4 RPers Commune de V.; 8 al. 1 Cst.
Lorsque la question de savoir si l'on est en présence d'une cause relevant de la fonction publique est l'objet du litige, le recours en matière de droit public est recevable si le recourant rend vraisemblable que, vis-à-vis de la question litigieuse, les conditions sont remplies, en application de la théorie des faits de double pertinence (c. 2).
Des rapports de travail du personnel étatique peuvent être soumis au droit privé s'il existe un fondement dans une réglementation cantonale ou communale claire et sans équivoque et que, dans le cas concret, on ne doive pas requalifier le contrat conclu entre les parties en rapport de droit public (c. 3-4).
Conclusion; qualité d’employeur lorsque le contrat est conclu au sein d’un groupe de sociétés; art. 18, 319 CO
Un contrat de travail au sein d'un groupe peut être conclu avec la société dominante, avec une des sociétés dépendantes ou avec les deux ; l'employeur est la partie qui a conclu le contrat en tant que tel ; il convient pour ce faire d'examiner respectivement quels organes ont agi et pour quelle société du groupe (c. 3).
Incapacité de travailler; conclusion d’une assurance d’indemnités journalières régie par la LCA; responsabilité de l’employeur en cas de non-paiement des primes; droit d’action directe de l’employé contre les organes sociaux de la société, art. 41, 97, 324a, 717 CO; 159 CP
En matière d'assurance perte de gain pour maladie ou accident, les parties peuvent conclure une assurance d'indemnités journalières soumise à la LCA ; l'assuré a un droit propre contre l'assureur et est le seul titulaire de la prestation d'assurance ; l'employeur est toujours débiteur des primes d'assurance ; lorsqu'il ne satisfait pas à ses obligations, notamment s'il ne paie pas les primes, il doit des dommages-intérêts (art. 97 CO) à l'employé correspondant aux prestations d'assurance perdues (c. 4).
Si les administrateurs de la société ont déduit des cotisations sur le salaire sans verser les primes à l'assurance, tant l'employé que la société elle-même subissent un dommage dont ils peuvent réclamer réparation ; le travailleur est ainsi légitimé à agir à titre individuel contre les organes en réparation du dommage direct subi, sur la base de l'art. 41 CO ; le dommage étant purement économique, l'illicéité doit résulter de la violation d'une norme de comportement destinée à protéger le lésé dans les droits atteints par l'acte incriminé ; l'art. 159 CP, qui protège les travailleurs contre le détournement des retenues de salaires, constitue une telle norme (c. 5-6).
Protection de la personnalité; droit de l’employé à la remise de copies de documents de l’employeur transmis à des autorités étrangères et contenant des données le concernant au regard de la loi sur la protection des données; art. 4, 8 al. 1, 2, 5 et 6, 9 al. 1 let. a et b et al. 4 LPD; 1 et 2 OLPD; 321a al. 4 et 339a al. 1 CO; 47 LB; 162 et 271 CP
Une banque ne peut pas se fonder sur les art. 47 LB et 162 CP pour s'opposer à la remise à ses employés d'une copie des documents transmis aux autorités américaines contenant des données les concernant mais aucune information permettant d'identifier les clients (c. 5).
Le maître du fichier peut refuser ou restreindre la communication de renseignements lorsque les données en cause sont intimement liées aux données personnelles de tiers ; l'anonymisation des documents peut suffire à protéger les tiers ; en l'espèce, le caviardage des clients et des autres collaborateurs de la banque permet une protection suffisante (c. 6).
Un abus de droit à réclamer la remise écrite d'informations peut exister lorsque le droit d'accès est exercé dans un but étranger à la protection des données ou dans le but d'espionner une (future) partie adverse et se procurer des preuves ; tel n'est en revanche pas le cas de l'employé qui réclame de telles données dans l'optique d'une éventuelle requête en dommages-intérêts contre son employeur (c. 7.1).
Le maître du fichier peut refuser ou restreindre la communication d'informations si ses intérêts prépondérants l'exigent ; il en a le fardeau de la preuve ; en l'espèce, la banque ne parvient pas à faire une telle démonstration du fait notamment que le risque potentiel de divulgation des documents est relativisé par l'engagement contractuel de ses employés, soumis au secret d'affaires, même après la fin du contrat de de travail ; en outre, la réglementation interne de la banque qui interdit aux employés d'emporter chez eux des documents confidentiels ne peut être considérée comme la renonciation à se prévaloir du droit d'accès de l'art. 8 LPD ; en effet, la renonciation ou la restriction au droit d'accès qui est anticipée est nulle et, si elle est postérieure, il faut que la personne concernée connaisse l'essentiel de l'information à laquelle elle pourrait avoir accès (c. 7.2-7.7).
La communication écrite des données est la règle ; la seule exception prévue figure à l'art. 1 al. 3 OLPD, lorsque l'intéressé consent à une communication orale ; la question de savoir si d'autres exceptions peuvent être envisagées peut demeurer indécise, la banque ne faisant valoir aucune circonstance concrète s'opposant à la remise d'une copie du dossier (c. 8.1-8.5).
L'art. 8 LPD n'est pas incompatible avec le devoir de restitution de l'art. 339a CO ; cette disposition impose un devoir de restitution de tous les documents en possession de l'employé, même des copies, à l'issue des rapports de travail ; il s'agit d'une prétention de l'employeur ; l'art. 8 LPD accorde pour sa part à l'employé un droit d'accès à ses données personnelles (c. 8.6).
Procédure; capacité d’ester en justice d’une société anonyme: préjudice irréparable en cas de décision privant la société de désigner une personne autorisée à la représenter en justice; art. 67 al. 1, 68 CPC; 54, 55 CC; 458, 460, 462, 718 et 720 CO; 93 al. 1 let a LTF
Une décision incidente est susceptible de recours devant le Tribunal fédéral si le recourant démontre un préjudice irréparable ; il s'agit nécessairement d'un préjudice de nature juridique ; cette condition s'apprécie au regard de la décision de première instance (c. 1.2).
Les organes exécutifs d'une personne morale et toutes les personnes qui peuvent valablement la représenter dans les actes juridiques avec des tiers sur la base des règles de droit civil ont la capacité d'ester en justice ; peuvent ainsi représenter en justice une société anonyme les membres du conseil d'administration, un tiers directeur auquel le conseil d'administration a délégué le pouvoir de représentation, un fondé de procuration inscrit au RC ou un mandataire commercial non inscrit au RC ayant reçu le pouvoir exprès de plaider (c. 1.3).
En l'espèce, la décision de la cour cantonale privant la société défenderesse de désigner l'une des personnes autorisées selon la loi et connaissant les faits de la cause pour la représenter en justice peut entraîner un préjudice irréparable puisque la question de savoir si une autre personne aurait pu également représenter la société ne pourra pratiquement pas être soulevée avec la décision finale (c. 1.4).
Fin des rapports de travail; procédure; étendue de l’obligation de restitution du travailleur; conditions à la recevabilité d’une requête en cas clair visant à la restitution de documents appartenant à l’employeur; art. 321a, 321b, 339a CO; 257 CPC
En cours de contrat comme au terme de celui-ci, le travailleur doit rendre compte et remettre à son employeur notamment tous les documents qu'il reçoit et qu'il produit dans le cadre de son activité professionnelle ; à la fin des relations de travail, cette obligation de restitution vise aussi les copies de documents (c. 3.1).
La procédure dans les cas clairs suppose que l'état de fait ne soit pas litigieux ou soit susceptible d'être immédiatement prouvé et que la situation juridique soit claire ; le demandeur doit apporter la preuve stricte des faits justifiant sa prétention (c. 3.2).
La restitution des documents appartenant à l'employeur peut être obtenue par le biais d'une procédure en cas clair si les conditions d'une telle procédure sont remplies ; il faut notamment que les documents réclamés soient clairement identifiables pour l'employé ; à défaut, les conclusions sont irrecevables ; en outre, seuls les documents ou informations obtenus en cours de contrat – et non après la fin de celui-ci – peuvent être réclamés ; lorsque, comme en l'espèce, l'employeur invoque des faits qui concernent pour certains des documents ou renseignements postérieurs à la fin du contrat et prend des conclusions globales, ni l'état de fait ni la situation juridique ne sont clairs, si bien que la requête est irrecevable (c. 3.3-3.4).
Procédure; dépôt du recours devant le tribunal ayant rendu la décision litigieuse; lacune dans la loi; transfert du recours à l’autorité compétente et sauvegarde du délai de recours; art. 63, 143 CPC; 48 LTF
Le CPC ne règle pas la question de la sauvegarde du délai de recours lorsque l'acte est adressé à une autorité matériellement ou fonctionnellement incompétente et de l'éventuelle transmission à l'autorité compétente ; il s'agit d'une lacune proprement dite qu'il appartient au Tribunal fédéral de combler ; lorsque l'acte est adressé à temps à l'autorité qui a rendu la décision attaquée, celle-ci doit transmettre le recours au tribunal supérieur compétent et le délai de recours est sauvegardé (c. 2-3).
Location de services; autorisation de pratiquer la location de services pour une organisation de soins à domicile et de services ménagers; art. 12 LSE; 26, 29 OSE; 321d CO
La différence principale entre location de services et rapport de mandat consiste dans le fait qu'en matière de mandat, il n'y aucun rapport de subordination au sens du droit du travail entre le mandataire et le mandant, alors que dans la location de services, le travailleur est soumis aux instructions du tiers ou de l'entreprise d'engagement ; pour distinguer ces deux formes juridiques, il faut tenir compte des circonstances du cas d'espèce et se fonder sur le contenu du contrat, la description du poste et la situation concrète du travail dans l'entreprise d'engagement, la dénomination utilisée par les parties pour qualifier leur contrat n'étant pas déterminante ; savoir si une organisation de soins à domicile et de services ménagers tombe sous l'obligation d'obtenir une autorisation au sens de la LSE dépend de l'activité concrète convenue et effectivement exercée ; dans ce domaine, le droit de donner des directives se détermine spécifiquement, du fait que les clients et les patients sont toujours libres d'accepter ou de refuser les interventions médicales et de se prononcer sur le traitement à suivre ; il faut donc qu'une partie des pouvoirs de direction, comme on l'entend au sens de l'art. 321d CO, ait été cédée aux clients ; ceux-ci peuvent ainsi établir des directives plus étendues sur l'exécution du travail et la conduite des auxiliaires dans le ménage que ce qui serait possible dans le cadre de l'exécution d'un mandat ; en l'espèce, l'autorité cantonale a établi sans arbitraire que les clients de la recourante disposaient de pouvoirs de direction importants concernant le déroulement d'une journée et l'exécution du travail chez eux (c. 2-3).
Il importe peu que l'activité donnant lieu à autorisation au sens de l'art. 12 LSE soit exercée à titre principal ou accessoire ; en outre, les conditions posées à l'art. 29 OSE, d'exercice régulier de la location de services et dans le but d'en tirer profit ou la réalisation d'un chiffre d'affaires annuel de CHF 100'000.- au moins, sont alternatives ; enfin, contrairement à ce qu'elle allègue, la recourante ne s'apparente pas à une organisation publique d'aide et de soins à domicile, laquelle prescrit des instructions détaillées à ses employés sur la manière d'exécuter le travail dans les différents foyers (c. 4).
Fonction publique; congé immédiat; nature des règles du CO auxquelles renvoie le droit public cantonal; conditions à l’octroi d’un «délai social» suite à une résiliation immédiate justifiée; art. 337 CO; 95 lit. a LTF; 29 Cst.
Lorsque le droit public cantonal renvoie, à titre supplétif, aux dispositions du Code des obligations, celles-ci constituent du droit public, si bien que le Tribunal fédéral ne peut contrôler leur application que sous l'angle restreint de la violation de droits constitutionnels (c. 3).
Le droit d'être entendu de l'employé est violé lorsque la décision de licencier a été prise avant l'audition de celui-ci (c. 5).
Un licenciement immédiat est justifié lorsque l'employé ne modifie pas son comportement malgré un avertissement exprès de l'employeur et que la continuation des rapports de travail ne peut raisonnablement être exigée de celui-ci (c. 6).
En droit public, un « délai social » (« Sozialfrist ») est admissible pour autant qu'il existe de justes motifs à un licenciement immédiat, que la prolongation des relations de travail n'égale pas le délai de résiliation ordinaire, qu'il n'y ait aucune violation de l'intérêt public et que l'octroi d'un tel délai le soit principalement dans l'intérêt de l'employé (c. 7).