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Stämpfli Éditions
L’annuaire du droit du travail 2023 présente un panorama complet de l’année passée sous revue. La jurisprudence fédérale et cantonale, soigneusement choisie par les éditeurs scientifiques, est complétée par une présentation détaillée de la législation fédérale incluant les changements législatifs en préparation, les communications du SECO et celles du Préposé fédéral à la protection des données. La consultation de l’ouvrage est facilitée par un index des matières en allemand et en français.
Cette newsletter contient la présentation de 14 arrêts du Tribunal fédéral.
Congé abusif; avertissement; alcoolisme; art. 336 CO
En l’espèce, n’est pas abusif le licenciement prononcé pour rupture du lien de confiance entre les parties, consécutive aux problèmes de dépendance à l’alcool de l’employée. Le fait que l’employeuse ait prononcé la résiliation juste après avoir averti l’employée qu’elle la licencierait si un nouvel épisode d’ébriété se produisait au travail, et alors qu’aucun épisode de ce genre ne s’était effectivement produit, ne la rend pas pour autant abusive, car l’attitude de l’employeuse ne saurait être qualifiée de contradictoire, aucune garantie quant au maintien de l’emploi n’ayant été donnée.
Congé abusif; arbitraire; motif; vol; art. 336 CO
En l’espèce, n’est pas abusif le licenciement d’une préparatrice en pharmacie pour vol au détriment de l’employeuse :
-les juges cantonaux n’ont pas établi les faits de manière manifestement inexacte, ni omis de prendre en considération certains faits pertinents, ni procédé à des constatations erronées, concernant les transactions suspectes de retour de produits contre remboursement aboutissant, en fonction des présences de différentes employées, à incriminer l’employée (cons. 3) ;
-l’employeuse avait entrepris les vérifications que l’on pouvait raisonnablement attendre d’elle et avait procédé au licenciement de l’employée sur la base d’indices sérieux d’actes répréhensibles ; l’employeuse n’avait pas exercé son droit de mettre un terme aux rapports de travail en nuisant à la considération de l’employée ou en la stigmatisant de manière inutilement vexatoire vis-à-vis de ses collègues (cons. 4).
Salaires; salaire variable contractuel; interprétation; art. 18 et 322a CO
Le gérant bancaire échoue à obtenir un rappel de rémunération, alors qu’il exigeait un nouveau calcul de son bonus en se fondant sur des avoirs sous gestion qu’il prétendait avoir apportés à sa banque employeuse :
-les clients avaient été amenés à la banque par plusieurs sources, à savoir l’employé puis un tiers, hypothèse non prévue par la réglementation du bonus. La suppression du mot « exclusivement » à partir de 2012 ne permettait pas d’interpréter le règlement de bonus comme incluant désormais les avoirs sous gestion litigieux, dès lors qu’un accord était intervenu entre les parties à ce sujet en 2011, actant l’exclusion des avoirs sous gestion correspondants, moyennant le versement de 50’000 francs ;
-le gérant n’avait jamais émis de contestation contre les décomptes du salaire variable qui lui avaient été transmis au fil des années, et n’était revenu sur la question de la prise en compte des avoirs sous gestion des clients amenés par l’apporteur d’affaires qu’en 2018.
Salaires; indemnisation; traite d’êtres humains; dommage; art. 4 CEDH; 15 CETEH; 19 LAVI
L’art. 19 al. 3 LAVI prévoit que le dommage aux biens n’est pas indemnisé dans le cadre de la LAVI. Est donc exclue l’indemnisation par la LAVI des dommages matériel et économique (cons. 3.).
Se fondant sur l’arrêt de la CourEDH Chowdury, une partie de la doctrine considère que la Suisse a l’obligation, au sens de l’art. 4 § 2 CEDH interprété à la lumière de l’art. 15 al. 4 CETEH, de mettre en place un système d’indemnisation des victimes de traite d’êtres humains, qui permette la réparation du dommage correspondant au salaire impayé soit par les auteurs de l’infraction, soit, de manière subsidiaire, par l’Etat (au moyen d’une indemnisation subsidiaire du dommage correspondant aux salaires impayés, par une modification de la LAVI ou par la création d’un fonds spécial en dehors de la LAVI) (cons. 4.2).
Selon le TF, il ne ressort pas de la jurisprudence de la CourEDH que l’art. 4 CEDH, même interprété à la lumière de l’art. 15 CETEH, prévoie une obligation positive d’instaurer un mécanisme d’indemnisation subsidiaire par l’Etat des victimes de traite d’êtres humains à hauteur des salaires qu’elles n’auraient pas perçus.
En l’espèce, il n’est pas contesté en l’espèce que le recourant a bénéficié d’une enquête et d’une procédure effectives et qu’il a obtenu une indemnisation pour tort moral.
Au surplus, le recourant ne peut, en l’état, rien tirer de l’art. 15 al. 4 CETEH. En effet, même si cet article impose l’adoption des mesures nécessaires pour assurer l’indemnisation du préjudice matériel des victimes, il ne ressort ni du texte de la disposition, ni du Rapport explicatif y relatif, que le préjudice matériel visé irait au-delà des dommages déjà pris en charge par la LAVI. Celle-ci prévoit en effet que le dommage en cas de lésions corporelles est indemnisé selon les règles du droit civil (art. 19 al. 2 LAVI) ; à ce titre, les frais médicaux et des dommages-intérêts résultant d’une incapacité de travail et/ou d’une atteinte à l’avenir économique de la victime peuvent lui être remboursés. Cela étant, la législation suisse paraît en l’état conforme aux exigences de la CETEH, dont le Rapport explicatif cite, comme seul exemple de préjudice matériel devant être indemnisé, les frais médicaux résultant de l’atteinte. Néanmoins, si le GRETA semble vouloir examiner la question de l’indemnisation des salaires non perçus par les victimes de traite, le Rapport d’évaluation relatif au troisième cycle d’évaluation pourrait apporter certaines clarifications relatives à la notion de préjudice matériel visé par l’art. 15 al. 4 CETEH ; ceci pourrait conduire, le cas échéant, le législateur suisse à se pencher sur la question (cons. 4.3).
Salaires; plan social; art. 18 et 335h CO
En l’espèce, l’employé ne pouvait plus prétendre à l’indemnité prévue par le plan social, revêtu en l’occurrence d’un effet normatif, car le motif du congé prononcé par sa nouvelle employeuse lui était imputable à faute : il ne voulait plus revenir travailler car il avait rencontré l’amant de sa femme chez cette employeuse.
En interprétant dans ce sens la notion de résiliation imputable à l’employé, la cour cantonale n’a manifestement pas violé le plan social (cons. 4)
Salaires; preuve; simulation; assistance judiciaire; art. 8 CC; 55 et 120 CPC
En l’espèce, c’est à bon droit que les juges cantonaux ont débouté la demanderesse de sa demande en paiement de rappels de salaire pour du travail qu’elle prétendait avoir effectué et qu’ils lui ont retiré le bénéfice de l’assistance judiciaire.
Aucun droit garanti par la Cst. ou la CEDH n’avait été violé (cons. 3).
La demanderesse n’était pas parvenue à prouver l’existence et le contenu de la relation de travail : elle n’avait été intégrée à l’entreprise que pour pouvoir obtenir un crédit, mais le contrat de travail n’avait été que simulé (cons. 5).
Salaires; convention collective de travail; fonction; art. 322 CO; convention nationale du secteur principal de construction en Suisse
En l’espèce, l’employé a bien exercé la fonction de chef de chantier, ce qui détermine le montant de la rémunération à laquelle il peut prétendre selon le droit collectif applicable :
Procédure; récusation; compétence à raison du groupe prud’homal; art. 47, 50 CPC; 10 LTPH/GE; 10 RTPH/GE
La transmission d’une affaire du groupe 3 au groupe 4 des prud’hommes de Genève, en raison du fait que l’employée sollicitait l’audition comme témoin d’un cadre responsable du service de sûreté de l’employeuse, qui était également président du groupe 3, représente une récusation spontanée justifiée (cons. 3.3-3.5).
Congé immédiat; vol; ordonnance de classement; art. 10, 34b, 34c LPers; 176, 183, 184 CCT CCF 2019; 336 CO
En l’espèce, l’arrêt du TAF est annulé et la cause renvoyée pour que soient constatés les faits en relation avec une éventuelle période d’incapacité de travail au moment de la résiliation des rapports de travail et, le cas échéant, qu’il soit déterminé si le recourant peut se prévaloir, en dépit de la résiliation immédiate des rapports de travail, d’un droit à une réintégration conformément aux art. 34c al. 1 let. c LPers et 184 al. 1 let. c CCT CFF 2019. A défaut, l’autorité précédente examinera si le calcul du droit au salaire en dépit de la résiliation des rapports de travail (art. 34c al. 1 let. c LPers et art. 184 al. 1 let. c CCT CFF 2019) comprend le salaire pendant la période de protection prévue par l’art. 336c al. 1 let. b CO ou l’art. 128 al. 1 CCT CFF 2019. Enfin, elle examinera si, en l’absence de réintégration, le recourant peut prétendre une indemnité au sens de l’art. 34c al. 2 LPers et de l’art. 184 al. 2 CCT CFF 2019 ou, à défaut, si une éventuelle résiliation prononcée pendant l’une des périodes visées à l’art. 336c, al. 1, CO doit être prise en considération pour fixer l’indemnité au sens des art. 34b al. 2 et 183 al. 2 CCT CFF 2019 (cons. 6.2).
Congé immédiat; insultes; harcèlement; groupe de confiance; art. 74 SP/TPG
En l’espèce, est conforme au droit le licenciement avec effet immédiat d’un collaborateur des TPG, dont la communication avait été hautement inadéquate, irrespectueuse de sa hiérarchie et, dans ce certains cas, préjudiciable à son employeur. Ne modifie pas cette analyse l'absence de son suivi psychologique ou médical et le harcèlement psychologique dont il se prévalait, le collaborateur n’ayant pas fait appel au groupe de confiance.
Congé immédiat; gestion déloyale des intérêts publics; délai de réaction; tardiveté; art. 15 LCFF; 337 CO
Est renvoyé à l’instance cantonale l’arrêt ayant octroyé six mois de traitement à titre d’indemnité, uniquement pour violation du droit d’être entendu dans le cadre d’un licenciement immédiat prononcé dans le cadre d’une gestion déloyale des intérêts publics. Le délai de réaction des CFF avant de prononcer le licenciement avec effet immédiat avait été trop long.
Lorsque la sanction sur le plan de la fonction publique est liée à l’issue d’une procédure pénale, il est légitime que l’autorité employeuse en attende l’issue avant de prononcer le licenciement. Ce ne fut pas le cas en l’espèce, puisque les CFF n’ont pas attendu cette issue avant de prononcer le licenciement (cons. 5.3.4).
Même si, eu égard aux conséquences juridiques d’un licenciement immédiat injustifié en droit de la fonction publique, le délai de réaction de l’autorité employeuse peut être plus long qu’en droit privé, on ne peut pas non plus permettre à l'employeur public de laisser la procédure en suspens pendant une longue période ou de ne pas informer l'employé de l’avenir de la relation de travail (cons. 5.3.5).
Licenciement; incapacité de travailler; droit d’être entendu; maladie; égalité de traitement; art. 37 Statut du personnel de la commune de Lutry; 324a, 336c CO; 8 Cst.
En l’espèce, n’encourt pas la censure la décision vaudoise ayant admis une violation du droit d'être entendu de l’employée communale et lui ayant alloué un montant correspondant à trois mois de salaire.
Traiter de façon différente une personne employée par la commune d’une personne qui a été licenciée, toutes deux en incapacité de travail, en tant que la première bénéficie du traitement versé par la commune puis de la couverture offerte par l’assurance collective conclue par la commune alors que la seconde se voit opposer un délai d’attente de 360 jours n’apparaît pas contraire à l’égalité de traitement. Cette différenciation repose sur une circonstance de fait décisive, à savoir l’existence ou non de rapports de travail, et permet de traiter de manière différente des situations dissemblables (cons. 7.3).
Dès lors que la commune n’avait pas conclu d’assurance perte de gain-maladie, ou plus précisément en avait conclu avec un délai d’attente d’un an, l’employée ne pouvait de bonne foi penser que le salaire continuerait à être versé après une éventuelle résiliation (cons. 8.2).
Sanctions; blâme; violation des directives; circulation routière; art. 9 et 29 Cst.; 6 CEDH; 30 ss LPAC/GE; 36 LPol/GE; 19 RGPPol/GE
Procédure; irrecevabilité; art. 93 LTF
Est irrecevable, faute de préjudice irréparable, le recours d’un directeur de cycle d’orientation contre l’arrêt des juges genevois s’étant limités, pour admettre la validité d’une décision constatant l’existence d’un harcèlement sexuel de sa part et inviter le Conseil d’Etat à examiner la question d’une éventuelle libération de l’obligation de travailler, à reprendre les faits établis par le groupe de confiance.
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