TF 4A_156/2021 du 16 juillet 2021
Conclusion; volonté, accord, principe de confiance; art. 1 CO
En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective. Lorsque les parties se sont exprimées de manière concordante, qu’elles se sont effectivement comprises et, partant, ont voulu se lier, il y a accord de fait ; si au contraire, alors qu’elles se sont comprises, elles ne sont pas parvenues à s’entendre, ce dont elles étaient d’emblée conscientes, il y a un désaccord patent et le contrat n’est pas conclu. Subsidiairement, si les parties se sont exprimées de manière concordante, mais que l’une d’elles, ou toutes deux n’ont pas compris la volonté interne de l’autre, ce dont elles n’étaient pas conscientes dès le début, il y a désaccord latent. Le contrat est alors conclu dans le sens objectif que l’on peut donner à leurs déclarations de volonté selon le principe de la confiance ; en pareil cas, l’accord est de droit (ou normatif).
En procédure, le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d’indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu’il s’agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l’époque les conceptions des contractants eux-mêmes.
L’appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. S’il parvient à la conclusion que les parties se sont comprises ou, au contraire, qu’elles ne se sont pas comprises, il émet des constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu’elles ne soient manifestement inexactes (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), c’est-à-dire arbitraires au sens de l’art. 9 Cst.
S’il ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties – parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes – ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté exprimée par l’autre à l’époque de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu’elle l’affirme en procédure, mais doit résulter de l’administration des preuves –, le juge doit recourir à l’interprétation normative (ou objective), c’est-à-dire rechercher leur volonté objective en déterminant le sens que, d’après les règles de la bonne foi, chacune d’elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l’autre. On parle là d’une interprétation selon le principe de la confiance (rappel de jurisprudence, cons. 3.2).
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