TF 6B_4/2020 du 17 décembre 2020
Sanctions; traite d’êtres humains; art. 182 CP
L’assimilation du recrutement à la traite d’êtres humains par l’art. 182 al. 1 CP, codifie la jurisprudence qui a rompu avec l’approche initialement restrictive de la traite d’êtres humains, envisagée exclusivement comme un mécanisme de type commercial, tripartite, en faveur d’une conception plus large, permettant d’incriminer déjà celui qui recrute, sans intermédiaire, des femmes pour son propre établissement de prostitution. Le recrutement au sens de l’art. 182 al. 1 CP doit ainsi être conçu comme le processus global qui amène une victime à se soumettre à l’autorité ou à la volonté d’autrui, alors que le recruteur la destine subjectivement dès le début de l’entreprise à l’exploitation, sexuelle notamment, ou encore, en d’autres termes, comme toute activité tendant à obliger ou engager une personne en vue de son exploitation. A titre illustratif, et dans la perspective d’un certain parallélisme avec le recrutement en matière de travail, le comportement typique du recruteur dans la traite d’êtres humains peut, par exemple, faire intervenir une offre contractuelle de travail trompeuse, utilisée comme un leurre pour tromper la victime vouée à l’exploitation. En tous les cas, l’essentiel du processus de recrutement se déroule en amont non seulement de l’exploitation elle-même, mais de la perte, par la victime, de son libre arbitre, qui signe la consommation de l’infraction de traite d’êtres humains sous cette forme. Le recruteur, qui est simultanément « acquéreur », agit pour son propre bénéfice et doit avoir en vue, subjectivement, l’exploitation de la victime. Par opposition, l’intermédiaire, dont la loi érige le comportement de nature plutôt participative en infraction à part entière, établit le contact entre offreur et acquéreur ou un autre intermédiaire (cons. 4.1).
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