TF 4A_463/2017 du 04 mai 2018
Gratification; qualification; art. 322 et 322d CO
Rappel de jurisprudence en matière de rémunérations variables (cons. 3.1).
Lorsque seul le principe du versement d’un bonus est contractualisé, le travailleur, aux termes de l’art. 322d al. 2 CO, n’a droit à une part proportionnelle de la gratification en cas d’extinction des rapports de travail (avant l’occasion qui y donne lieu) que s’il en a été convenu ainsi, ce qu’il lui incombe de prouver en vertu de l’art. 8 CC (cons. 3.1.3.1).
Le Tribunal fédéral souligne en particulier quatre points :
1° Il ne faut pas confondre le salaire (variable), la gratification à laquelle l’employé a droit et la gratification à laquelle il n’a pas droit. Pour déterminer dans un cas concret si le montant du bonus est un salaire variable ou une gratification, il faut examiner si, selon la volonté des parties, le bonus est déterminé (ou objectivement déterminable) ou indéterminé (ou objectivement indéterminable).
2° Un contrat de travail et le salaire convenu peuvent certes être modifiés par les parties au cours de la relation contractuelle, mais il ne faut pas confondre une modification du salaire convenu par un accord ultérieur des parties avec la fixation du montant de la gratification dans un cas concret. La gratification prévue en principe ne peut pas changer de nature du seul fait que le montant en est discuté et fixé ultérieurement.
3° Le fait que l’octroi du bonus est soumis à la condition que l’employé soit toujours dans les effectifs de la société et n’ait pas démissionné au moment où le paiement sera dû, est typique d’une gratification, et non d’un salaire.
4° Ce n’est que pour les gratifications (bonus) auxquelles l’employé n’a pas de droit contractuel que se pose la question d’une conversion du bonus en salaire par application du principe de l’accessoriété, principe qui ne s’applique toutefois pas lorsque l’employé perçoit un très haut revenu (cons. 3.2).
En l’espèce, le contrat de travail stipule que le bonus dépend de la performance, laquelle doit être mesurée sur la base des pertes et profits de l’entreprise ; toutefois, il n’indique aucun pourcentage des profits, ni aucune clé de répartition de ceux-ci entre les employés qui permettrait à l’employé de déterminer lui-même quel est le montant de son bonus. Ce pourcentage ou clé de répartition dépend donc de la seule appréciation de l’employeuse. La disposition contractuelle ne remplit ainsi pas la seconde condition posée par la jurisprudence pour que le bonus soit qualifié de salaire variable, à savoir que le montant soit déterminé ou doive l’être sur la base de critères objectifs prédéterminés et qu’il ne dépende pas de l’appréciation de l’employeur (cons. 4.3.1).
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